Mission IGAS dans le 93 : ce sont les entreprises qu’il faut inspecter, pas les agent-e-s !

Contre les intérims structurels, pour un plan de recrutement massif

Rassemblons-nous le 10 octobre à BOBIGNY en solidarité avec nos collègues du 93

 

« Bonnes vacances, mais révisez bien vos chronos, interro par l’IGAS a la rentrée!  » C’est en substance le message adressé le 12 juillet par le RUD de Seine Saint Denis aux agent-e-s du Pole T pour confirmer le lancement d’un contrôle de l’IGAS dans le département. Lequel contrôle vise à « évaluer le niveau et la qualité de l’activité de l’inspection du travail » et à « objectiver la charge de travail des agents« . L’encadrement a été entendu en juillet et en septembre, et la totalité ou presque des collègues du pôle travail le seront à partir du mois d’octobre, sur la base de leurs chronos des deux dernières années !

Notre ministère a un sens du timing à toute épreuve : non seulement l’annonce d’un tel contrôle juste avant les congés d’été a pu être vécue comme particulièrement angoissante, mais elle intervient alors qu’une alerte pour danger grave et imminent est en cours du fait du manque dramatique d’effectif sur le site détaché de Roissy (au point que la direction a annoncé sa fermeture tous les vendredi pendant l’été), et que les agent-e-s du Pole T ont subi collectivement le choc du suicide d’un collègue quelques semaines auparavant, au sujet duquel une enquête du CHSCT est en cours.

Alors pourquoi cette « descente » de l’IGAS dans le 93 annoncée en plein mois de juillet ? Le contexte et la motivation sous-jacente de ce contrôle, pour le moins, nous interrogent. Depuis plus de deux ans, les agent-e-s de contrôle du département dénoncent le caractère illégal des intérims structurels que leur impose le ministère et refusent de les effectuer pour exiger que les postes soient durablement pourvus et pour préserver leur santé. N’en pouvant plus de devoir, depuis des années, tenir plusieurs postes à la fois, elles et ils ont saisi le tribunal administratif pour lui demander de constater le caractère illégal de l' »organisation » du travail mise en place par la direction. Et la situation perdure : au premier semestre 2022, 30% des sections d’inspection du département n’avaient pas d’agent titulaire. A la rentrée, le site détaché de Roissy ne comptait plus que 3 inspecteurs/trices pour 8 postes ! Un contrôle de 4 IGAS dans un tel contexte ne peut que susciter de l’indignation des collègues. La hiérarchie a-t-elle besoin d’une enquête poussée pour découvrir ce que tout le monde sait déjà ? Il manque 30% d’effectifs, ces effectifs manquants nuisent à la santé des collègues et rend leur action moins efficace.

Ou s’agit-il en fait d’une mesure de rétorsion contre nos collègues et leur mobilisation ? La lettre de mission envoyée par Madame BORNE, alors ministre du travail, au chef de l’IGAS, Monsieur AUDIGE, le 13 mai 2022 laisse peu de place au doute : « le fonctionnement du service public de l’inspection du travail connaît une forte dégradation en Seine-Saint-Denis, dégradation qui se traduit notamment par le fait que certains actes obligatoires, tels que l’instruction des demandes d’autorisation de licenciement des salariés bénéficiant d’un statut protecteur, ne sont plus systématiquement assurés ». Ce que le ministère a dans le collimateur, c’est bien le refus des intérims structurels et la non-instruction de demandes de licenciements de salariés protégés, le reste il s’en fout ! Le ton est le même que celui de la note de Monsieur STRUILLOU en date du 7 février 2020, dans laquelle il donnait carte blanche aux hiérarchies du ministère pour sanctionner les agent·e·s qui ne remplissaient pas leurs « obligations de service » en n’instruisant pas les dossiers de LSP des sections qui leur étaient affectées en intérim. Et, cerise sur le gâteau,  Madame BORNE ose écrire dans sa lettre que les « représentants [des salariés] se plaignent de ne pas obtenir de réponse à leurs demandes », alors que les organisations syndicales interprofessionnelles de Seine-Saint-Denis ont saisi le tribunal administratif aux côtés des syndicats du ministère pour faire reconnaître la carence de l’Etat à assurer la continuité du service public dans le 93.

Au lieu d’admettre la gravité de la situation, le ministère, alors qu’aucun responsable régional ou national n’est venu à la rencontre des agent-e-s depuis le début du mouvement, choisit d’envoyer 4 IGAS fouiller les chronos pour mettre en cause des collègues qui se dépatouillent du mieux qu’elles et ils le peuvent dans une situation très dégradée. C’est hors sujet ! Le problème n’est pas le « niveau d’activité » des agent-e-s c’est le manque structurel de moyens humains, avec plus de 300 sections vacantes au niveau national faute de recrutements suffisants ces dernières années – et alors qu’en Île de France des postes devraient être créés pour respecter le prétendu taquet de 10 000 salariés par agent-e de contrôle. Le marasme est tel que le nombre de postes ouverts au concours a été relevé en catastrophe (200 cette année) afin d’éviter que la situation ne se dégrade davantage. Mais cette année encore les recrutements budgétés ne seront que partiellement réalisés et des postes seront perdus, la faute à des années de dénigrement de la fonction publique et de l’inspection du travail. Plutôt que de consacrer son énergie et ses moyens à contrôler les agent-e-s restant-e-s, le ministère devrait mettre en place le plan de recrutement et de formation de masse dont les services ont besoin pour rendre les services dû aux usager-e-s !

Nous ne nous laissons pas faire, le CTSD d’Île-de-France a voté une motion demandant l’arrêt de cette mission IGAS le 21 juillet 2022 au vu des risques psychosociaux qu’elle génère. Le CHSCT de l’UD 93, réuni 5 jours après a voté une motion similaire. Et l’ensemble des organisations interprofessionnelles de Seine-Saint-Denis ont adopté un communiqué dénonçant  les méthodes du ministère.

Nous appelons à la solidarité avec nos collègues du 93 injustement mis-e-s sur la sellette. Rassemblons-nous à l’UD de Bobigny le 10 octobre à 14h30, à l’occasion de la l’audition par la mission IGAS des organisations syndicales locales, pour exiger l’arrêt de contrôle qui vise à bâillonner les agent-e-s. Ce sont les entreprises qu’il faut inspecter, pas nos collègues !

tract Igas vmaq