Dans un récent article de l’Humanité[1], la DGT – Direction Générale du Travail – ose indiquer qu’un premier élément de réponse apportée à la question des accidents mortels du travail – sujet d’une actualité brûlante, avec plusieurs morts récentes à déplorer, notamment des jeunes travailleurs qui découvraient le monde, actuellement meurtrier, du travail – est le recrutement d’inspecteur.trices du travail :
« Près de 180 inspecteurs du travail « prendront leur poste à l’été 2025 et 159 inspecteurs élèves sont actuellement en formation pour une prise de poste à l’été 2026 », affirme la DGT. L’objectif est de déployer des agents de l’inspection du travail l’année prochaine, auprès des élèves de lycée professionnel, « afin de les sensibiliser aux risques professionnels et de les informer sur leurs droits »
Non seulement ces recrutements ne permettront pas de combler les postes actuellement vacants et les départs en retraite qui continuent, à un rythme soutenu, mais notre organisation syndicale vient d’apprendre qu’ils sont brutalement stoppés : les postes ouverts aux concours pour cette année retombent à… 45, soit deux fois moins que les seuls départs prévus en retraite sur la même période !
La DGT en a parfaitement conscience : selon ses propres calculs, à l’issue du processus d’affectation des Inspecteur.trices du travail actuellement en formation, le « taux de vacance sera réduit à 10% ». Décryptons ce chiffre : à la fin de l’été 2026, dans 18 mois, il restera encore 200 sections vacantes, sur les 2000 qui ont survécu à 10 années de sabordage de nos effectifs ! Il y avait 2400 sections en 2014 ! 200 sections vacantes, c’est 200 zones de non-droit du travail, où les travailleur.ses n’ont pas d’interlocuteur dédié, où les contrôles ne peuvent pas être menés ! Et en ne recrutant que 45 Inspecteur.trices du travail aux concours 2025, le « taux de vacance » recommencera à se creuser, dès 2027. Il ne s’agit donc ni de créer de nouvelles sections, alors que les besoins sont criants puisque le nombre de salariés augmente, ni de réellement pourvoir les sections vacantes, alors même que l’Etat a été condamné pour avoir laissé des postes structurellement vacants dans le département de Seine-Saint-Denis.
Quant aux effectifs dans les secrétariats de l’inspection du travail, pourtant essentiels au bon fonctionnement du service, c’est toujours la dégringolade. De nombreux postes devenus vacants restent non pourvus – voire sont supprimés – sous prétexte de dépassement des plafonds d’emploi, de revue des missions, …
Derrière les grandes déclarations de la Ministre du Travail, A. Panosyan-Bouvet, qui fait de la lutte contre les accidents du travail une « priorité absolue », l’austérité budgétaire appliquée sans aucun discernement et dans une logique de sape des services publics fait des ravages, dans nos services, comme dans les autres.
Du côté des agent.es de l’Inspection du travail, la colère face aux accidents mortels du travail et la compassion pour les familles des victimes sont réelles ; il ne s’agit en aucun cas d’un affichage politique démagogique. Et la colère est renforcée par l’état actuel de nos effectifs et de nos moyens qui ne permettent pas d’intervenir autant que nous le voudrions sur le terrain essentiel de la prévention. Elle est aussi renforcée par le niveau scandaleusement faible de la répression de la délinquance patronale qui peut continuer à faire des ravages, en toute impunité, ou presque.
Pour lutter contre le fléau des accidents du travail, comme nous l’indiquions dans un précédent communiqué[2], il faut des actes, pas des mots, à commencer par le doublement des effectifs de l’inspection du travail, le rétablissement d’une instance de représentation du personnel dédiée aux questions de santé et de sécurité, l’encadrement strict du travail des plus jeunes et une politique pénale du travail intransigeante.
[1] https://www.humanite.fr/social-et-economie/accidents-du-travail/morts-au-travail-pourquoi-les-jeunes-sont-les-plus-touches
[2] https://cgt-tefp.fr/des-actes-pas-des-mots-pour-prevenir-les-accidents-du-travail/