Un dossier qui fait pschitt !! Le tribunal administratif annule la sanction infligée à notre collègue Sofiane[1]

CGT – CNT – SUD

En octobre 2022, à la suite d’une procédure disciplinaire réclamée et suivie personnellement de près par le directeur de l’INTEFP, Hervé Lanouzière, la DRH notifiait à Sofiane, alors inspecteur élève du travail, une sanction d’exclusion temporaire d’une durée d’un mois, après l’avoir suspendu à titre conservatoire pendant six mois. Nous nous félicitions à l’époque d’un recul de l’administration, qui avait envisagé rien moins que la révocation de notre collègue pour des griefs farfelus et insignifiants (voir nos précédentes communications ici et ) en usant des procédés les plus déloyaux et attentatoires à la vie privée.

Par ses jugements du 26 janvier dernier, devenus définitifs en l’absence d’appel, le tribunal administratif de Lyon a rétabli notre collègue dans ses droits et son honneur, et a vertement désavoué l’administration. Dans ses conclusions, le rapporteur public a évoqué d’emblée « un dossier qui fait pschitt ». Au fur et à mesure de la procédure l’administration est passée d’une montagne d’accusations sans preuves, ridicules, loufoques, et insignifiantes (dont un prétendu vol de Playstation !) à un unique grief retenu, et non étayé, dans la décision de sanction, à savoir l’utilisation d’un ordre de mission pour l’achat d’un billet vers une résidence autre que celle déclarée à l’administration, ce que permettait la « politique voyage » de l’INTEFP tant que cela n’engendrait pas de surcoût. Le juge administratif annule la décision en se prononçant sur le fond, alors qu’il aurait pu s’en tenir à une irrégularité de procédure, en retenant notamment que :

  • Notre collègue était de bonne foi, la réservation des billets en question avait fait l’objet d’une validation de l’administration, et il avait spontanément proposé de rembourser lorsque l’INTEFP lui a indiqué que ce voyage posait problème. « Par suite, le requérant est fondé à soutenir que le ministre a commis une erreur de fait en estimant que son voyage vers la Tunisie n’avait pas fait l’objet d’une demande préalable ou de régularisation auprès de l’administration » ;
  • La réservation des billets en question s’inscrivait dans le cadre d’un usage en vigueur et Sofiane « pouvait raisonnablement penser que sa demande était conforme à la tolérance administrative pratiquée au sein de l’établissement » ;
  • Sofiane a été traité différemment des autres collègues qui ont procédé de la même façon car « un contrôle a posteriori a été effectué à l’été 2022 pour toute la promotion 2021, et que sept sur quatre-vingt-cinq dossiers des « élèves inspecteurs » sont ressortis avec des anomalies sans pourtant que des procédures disciplinaires aient été engagées à l’encontre de ces autres élèves »

Déroute supplémentaire pour l’administration, le juge annule également la décision de suspension conservatoire, qui avait empêché Sofiane de poursuivre normalement sa scolarité et avait considérablement porté atteinte à sa santé, au point qu’il avait dû être hospitalisé plusieurs semaines. Le juge retient que les griefs sur lesquels se fondaient l’administration pour suspendre notre collègue étaient pour certains imaginaires, pour d’autres des accusations gratuites voire calomnieuses : « Par ailleurs, si le directeur de l’établissement fait également état dans son rapport de l’existence d’un vol au sein de la bagagerie de l’établissement durant cette période, et qu’une enquête de gendarmerie était en cours, le ministre ne disposait pas d’éléments permettant, à la date de la décision attaquée, ni au-demeurant ultérieurement, de mettre en cause directement M. XXX pour ce vol ». Ou encore, s’agissant de sa participation à un tournoi dans l’équipe tunisienne de rugby à 7 : «sa situation à la date de la décision attaquée ne pouvait être considérée comme constitutive d’un cumul non autorisé d’activité vraisemblable, alors en outre que la ministre n’indique pas en défense en quoi cette situation isolée aurait été de nature à troubler le fonctionnement du service ». Il aurait donc fallu l’arbitrage du juge administratif pour faire entendre à notre ministère que nous avons le droit de pratiquer bénévolement une activité sportive sur notre temps libre !

Ces décisions sont un camouflet pour le directeur de l’INTEFP, qui avait fait preuve d’un véritable acharnement contre notre collègue en usant de procédés sournois et scandaleux, voire carrément illégaux : versement au dossier de pièces protégées par la loi et obtenues « par la bande », affirmation fallacieuse selon laquelle le collège faisait l’objet d’une « enquête pénale en cours », attestations basées sur des bruits de couloirs (par exemple dans le rapport relatif à la demande de Sofiane de reconnaissance d’imputabilité au service de l’arrêt de travail consécutif à la suspension « M. xxx est vu par des formateurs dans un restaurant lyonnais, à table et de très bonne humeur avec ces mêmes IET, ce qui m’a été rapporté de manière informelle »), interpellation pendant un arrêt maladie et remise en cause de la réalité du motif médical lié à cet arrêt…

C’est également un camouflet pour la DRH qui a accepté de suspendre notre collègue, puis de monter une procédure disciplinaire sur la base d’un dossier vide, malgré les alertes et interpellations de nos organisations tout au long de la procédure. Le juge administratif vient lui rappeler que non, même en maintenant la rémunération, elle ne peut pas débrancher à l’envie les agent.es sur la base de dossiers « ni fait ni à faire », comme elle l’a fait encore l’été dernier en suspendant un agent de Paris qui avait subi un incident de contrôle.

Si le juge administratif n’emploie pas directement le terme, les motivations des jugements confirment enfin le caractère discriminatoire de la procédure, que nous avons dénoncé depuis le début : accusations gratuites, procédure disciplinaire pour Sofiane alors que ses collègues de promotion ont simplement reçu une demande de remboursement (elle aussi infondée par ailleurs), reproches de cumul d’activité invraisemblables etc.

Nos organisations demandent à l’administration de tirer toutes les conséquences de ces jugements en présentant à notre collègue des excuses officielles pour l’acharnement  dont il a fait l’objet (le directeur de l’INTEFP est allé jusqu’à faire procéder à la destruction de ses effets personnels entreposés dans la bagagerie !), en réparant les préjudices qu’il a subi, en donnant suite à sa demande de protection fonctionnelle, et en abandonnant les demandes de remboursement infondées adressées aux collègues de sa promotion qui l’ont soutenu. A défaut, elles seront aux côtés de Sofiane dans toutes les procédures qu’il souhaitera initier pour demander à l’administration d’en répondre.

 

[1] Le prénom du collègue a été modifié