Des CMAT aux CDET – Défendons les agents et les services Emploi

Sapin-Rebsamen ont prévenu : le projet « Ministère Fort » de destruction-dénaturation du Ministère du Travail, de l’Emploi et du Dialogue Social s’applique aussi aux services support et aux services de l’emploi dans un contexte marqué par le plan d’austérité, les réductions d’effectif, le pacte de responsabilité, la réforme territoriale et les pathétiques déclarations d’amour du Premier ministre aux employeurs et actionnaires. C’est là que se joue la réforme du volet emploi.

Manuel Valls n’est en effet pas le seul à vouloir se faire ovationner par la fraction la plus radicalisée du patronat qu’est le MEDEF. Rebsamen n’a d’ yeux que pour les « entrepreneurs », nouveaux héros des temps modernes, aux bénéfices desquels sont subordonnées toutes les politiques publiques : « (notre rôle) est de créer le cadre qui encourage et accompagne les créations d’emplois » ; « les entrepreneurs doivent avoir confiance en notre détermination à les aider » ; « la puissance publique est là pour les épauler » ; ou encore « trop souvent perçus comme des ralentisseurs de l’innovation, du risque, de l’embauche, les services de l’Etat sont, au contraire, aux côtés des acteurs économiques » a-t-il ainsi déclaré, comme un laquai devant ses maîtres, devant les « forces vives du tissu économique et social » à Lyon le 16 juin 2014. On remarquera au passage, qu’à force d’asséner l’idée que seule la sphère privée produit de la richesse, il s’interdit de dire que la puissance publique est un modèle : elle est innovante, recrute en emploi pérenne et produit 20% du PIB.

C’est dans ce sens qu’il faut comprendre et combattre la transformation des anciens CMAT (chargés de mission d’animation territoriale) en CDET (chargés du développement de l’emploi et des territoires), l’un des premiers avatars du Ministère Mort côté emploi.

Il ne s’agit pas d’idéaliser certaines des missions et des moyens qui étaient précédemment confiés aux CMAT ou plus largement aux pôles en charge de l’emploi, mais au moins l’angle d’attaque était-il alors l’usager, les chômeurs et populations précaires : c’est désormais au service exclusif des entreprises et des territoires, placés en concurrence pour attirer Dieu employeur-actionnaires, que seront pensées et conduites les politiques de l’emploi. Les CDET seront alors priés, en collaboration avec les chargés de missions de la DRIRE « d’élargir leurs compétences à l’entreprise ». L’entreprise n’est malheureusement pas entendue comme l’entité comprenant les salariés qui seuls produisent, mais comme l’employeur qui doit rendre les plus productifs possibles les employables, au moindre du coût, pour gaver les actionnaires.

Pour le coût et l’employabilité, l’Etat se charge de tout : le pacte de responsabilité-CICE, en ajoutant une nouvelle couche d’exonérations de cotisations sociales et fiscales, qui concerne 82% des salariés aujourd’hui – 93% en 2016 – réduit le salaire total (net + cotisations sociales) à peau de chagrin et pour l’employabilité, la sécurisation des parcours professionnels naturalise la précarité et cultive la compétence comme le réclame à cor et cri le CNPF-MEDEF depuis 1998, en lieu et place de la qualification professionnelle adossée aux conventions collectives : c’est le capital humain ou la ressource humaine qui triomphe sur le salarié.

La nouvelle fiche de poste le mentionne d’ailleurs expressément dans les missions des CMAT-CDET : ils doivent « accompagner les entreprises en matière de gestion des ressources humaines (sic !) et d’adaptation des compétences (sic)» La ressource humaine est une matière première qu’on paie à la compétence, soumise à l’arbitraire de l’employeur, au contraire du salarié qu’on paie selon une grille négociée. Voilà l’enjeu.

Or, pour l’accompagnement du développement économique des entreprises du territoire et la mise en œuvre des dispositifs encadrés et financés par l’Etat, il existe les chargés de mission du développement économique (CDEI).

Il en ressort un sentiment de concurrence entre agents et une dégradation des conditions de travail avec sa traduction tant au niveau de la rémunération que de la formation.

Nos collègues CEF (coordonnateur Emploi Formation) puis CMAT ont acquis une expérience indiscutable sur les territoires en orientant les actions et les financements sur la base de diagnostic et de plans d’action, avec des exigences en terme d’emploi.

L’Etat fixe la politique d’emploi au profit de celles et ceux qui en sont douloureusement exclu(e)s. Ce n’est pas une offre de service qui serait proposée à l’Entreprise toute puissante.

Et pour les CMAT-CDET, les « nouvelles missions » apparaissent alors comme sources de conflit de valeurs et donc de souffrance au travail.

La CGT affirme que la politique publique de l’emploi, les dispositifs emplois doivent être au service de l’usager, chômeur et travailleur précaire, pas au service du patronat et des actionnaires (aides diverses sans contreparties ni contrôle, exonérations de cotisations sociales et fiscales …) ou des « territoires » placés dans une logique de concurrence pour « améliorer leur compétitivité ». Elle doit avoir pour seul objet la qualification professionnelle pour assurer aux salariés un salaire intégré aux grilles des conventions ainsi que la suppression du chômage dont la massification organisée depuis 40 ans fait pression à la baisse sur les salaires, crée la précarité et la mise en concurrence des chômeurs et des salariés. La politique de l’emploi ne doit pas être une offre de services pour les employeurs qui ne visent que la hausse de la productivité et la profitabilité !

La CGT exige :

–  une politique de l’emploi qualifié et pérenne au service des usagers, chômeurs et précaires avec des moyens qui garantissent l’égalité de traitement des territoires ; donc en opposition à la loi de « sécurisation des parcours professionnels » qui organise la précarité et l’employabilité, ça veut dire

o   formation certifiante des chômeurs et obligation de reconnaissance par l’employeur de cette nouvelle qualification acquise, en particulier par la voie de la VAE ;

o   ça veut dire interdiction des contrats courts et extension du CDI à tous

o   ça veut dire, lors d’un changement d’emploi, indemnisation par l’Unedic de tous les chômeurs le temps d’en retrouver un autre ;

o   ça veut dire fin des exonérations de cotisations sociales, compensées par l’impôt qui fiscalise la sécurité sociale et dénie leur qualité de producteurs aux salariés concernés, soit 50% des salariés avec les seules exonérations Fillon, 82% si l’on ajoute le Pacte de responsabilité aujourd’hui, 93% en 2016 !!

–  Pour les agents :

o   Fin de la promotion des contrats aidés précaires et mal payés ;

o   Fin des objectifs chiffrés, notamment en termes de consommation de contrats aidés ;

o   Affectation des agents aux postes qu’ils souhaitent ;

o   Pour un contrôle en toute indépendance des aides aux entreprises ; vis-à-vis des règles d’octroi des aides et vis-à-vis du respect du Code du travail

o   Retrait immédiat de la fiche de poste CDET qui dénature la mission des CMAT, ajoute une charge de travail sans compensation salariale.

o   Des moyens suffisants pour assumer l’ensemble des missions dans de bonnes conditions.