Rémunération des catégories B et C : il y a urgence au ministère du travail
Fin d’année 2022, le ministre Olivier DUSSOPT avait annoncé en grande pompe une revalorisation « exceptionnelle » des planchers d’IFSE pour les corps de l’inspection du travail et des contrôleur.ses du travail dans le cadre d’une opération de convergence indemnitaire avec les autres ministères. A cette occasion, nous avions largement dénoncé les choix du ministère puisque:
-l’enveloppe a plus que proportionnellement profité aux responsables d’unité de contrôle, qui ont non seulement bénéficié d’une indemnité spécifique de 3000 euros intégrée de manière pérenne à l’IFSE mais sans doute pour certain.es également d’une revalorisation supplémentaire liée au rehaussement du plancher (205 agent.es des services déconcentrés, relevant des groupes 1 et 2 de fonction correspondant à l’encadrement ont profité de ce rehaussement d’après les propres chiffres du ministère). On se souvient également qu’en 2018, les responsables d’unité de contrôle avaient bénéficié d’une hausse généralisée de l’IFSE (entre +400 et +1 100 euros par an) pour « renforcer l’attractivité du poste ».
- es 18% des contrôleur.ses du travail (60% des IT, 100% des RUCs) ont bénéficié de cette opération de revalorisation, alors même que depuis la mise en œuvre du ministère « fort », ces derniè.res n’ont bénéficié d’aucune mesure salariale.
- la DRH n’avait fait aucune proposition de revalorisation pour les agent.es de catégorie C, exclues du dispositif de convergence indemnitaire qui avaient bénéficié aux attaché.es et aux secrétaires administratif.ves et ce alors même que les mesures indiciaires de janvier 2022 ont perdu de leur effet avec l’augmentation du SMIC liée à l’inflation. Les grilles de rémunération connaissent en effet un tassement sans précédent : les agent.es de catégorie C passent désormais 12 années à l’indice minimum et les agent.es de catégorie B sont également rattrapé.es : beaucoup de nos collègues, surtout des femmes, et leurs familles survivent désormais avec le traitement minimum.
Si 60% des Inspecteurices du travail ont bénéficié d’une augmentation de leur IFSE lors de l’opération de convergence indemnitaire, nous attendons toujours des précisions de la DRH, qui malgré ses engagements, ne nous a toujours pas indiqué : le montant moyen alloué selon les groupes de fonction, et les métiers et fonctions concernées par la revalorisation. En effet, il est bien possible que ces mesures de revalorisation n’aient finalement profité dans les faits qu’aux collègues entré.es le plus récemment dans les services, les plus ancien.nes percevant d’ores et déjà un IFSE proche des nouveaux planchers.
Nous nous attendions légitimement compte-tenu des échanges intervenus à ce que la DRH revienne avec des propositions sérieuses en matière de rémunération pour nos collègues de catégorie B et C.
Et non ! Les dernières mesures salariales prises en faveur des bas salaires dans la fonction publique constituent une vaste escroquerie, en particulier pour les agent.es de catégorie C à qui l’on avait promis un gain indiciaire pour le bas de grille. En réalité, il ne s’agit que d’un point d’indice seulement, soit 4,92 euros, gagné entre chaque échelon et ce jusqu’au 8ème de la grille C1. Ces nouvelles grilles sont insuffisantes pour réinstaurer une progression de la rémunération en début de carrière. Et elles ne couteront pas grand-chose au gouvernement : vu le peu de points accordés, les nouvelles grilles seront rapidement rattrapées par le SMIC elles aussi.
Au détour d’une discussion intervenue au CSA du 16 juin 2023 sur les mutations, la DRH a annoncé une réforme des règles de revalorisation de l’IFSE, et dans la foulée propose un projet de circulaire RIFSEEP actualisé qui tout en faisant la part belle à l’encadrement contient des reculs importants pour les agent.es des ministères sociaux.
Mobilité au sein d’un même groupe (dite latérale) :
Le coup pourrait être porté ici aux agent.es de contrôle de l’inspection du travail. Jusqu’ici, la règle était assez simple quoique diversement appliquée sur le territoire : dès lors qu’un.e agent.e de contrôle disposait d’au moins 3 ans d’ancienneté sur son poste, l’affectation sur une autre section y compris au sein de sa résidence administrative entraînait une revalorisation annuelle de l’IFSE d’un montant de 500 euros pour les CT et 700 euros pour les IT. Dénonçant « les petits malins » qui organiseraient leur rotation sur les sections tous les trois ans, la DRH souhaiterait rabattre les cartes et revoir le dispositif de revalorisation de l’IFSE en cas de mobilité d’une section à une autre au sein d’une même résidence administrative. Lors du groupe de travail tenu le 15 juin 2023, la DRH nous a indiqué que les arbitrages définitifs sur cette question n’étaient pas rendus face à l’opposition unanime des organisations syndicales. Alors que de nombreux.ses collègues attendent toujours leurs revalorisations au titre de la mobilité promise pour mars ou avril, nous dénonçons les basses manœuvres de la DRH.
Les revalorisations de l’IFSE au titre de l’expérience pourraient être supprimées après 13 ans sur un même poste pour les agent.es de catégorie A en l’absence de toute mobilité :
Les revalorisations au titre de l’expérience interviendraient selon un nouveau rythme (2 ans, puis 3 ans, puis au terme de deux périodes de 4 ans). Par suite, et selon la nouvelle circulaire proposée, les agents de catégorie A n’auraient plus vocation à voir revaloriser leur ifse au titre de l’expérience après 13 ans dans le cas où iels ne changeraient pas de poste. Pour les agent.es de contrôle, dont les perspectives de mobilité sont déjà largement amputé.es (priorisation des postes hors section aux attaché.es par exemple), cela pourra conduire à l’absence de toute revalorisation indemnitaire associée aux nouvelles règles proposées en matière d’IFSE mobilité.
Une nouvelle règle permettant à l’administration de diminuer l’IFSE à l’occasion d’un changement de fonction vers « un niveau inférieur » :
Jusque-là, la seule hypothèse très improbable de diminution de l’IFSE résidait dans le fait que l’agent.e dispose d’un montant d’IFSE supérieur au plafond du groupe de niveau inférieur qu’il rejoignait. Désormais l’administration se réserverait le droit de réduire le montant d’IFSE d’un.e agent.e qui n’aurait pas accompli au moins 2 ans sur son poste en cas de mobilité dite « descendante » (sur une fonction cartographiée par l’administration comme de moindre valeur).
Disponibilité, congé parental et congé de longue durée où la porte ouverte à toutes les discriminations :
Avant l’entrée en vigueur de la nouvelle circulaire, L’agent.e conservait le montant de l’IFSE attribué avant le placement dans ce type de congé. Désormais, l’agent.e qui reviendrait d’une disponibilité, d’un congé parental, ou d’un congé longue durée peut voir son IFSE diminué s’iel n’occupe pas un poste d’ « un niveau comparable » à l’ancien poste. Cette possibilité de réduire le montant d’IFSE constitue à notre sens un facteur éventuel de discrimination fondé sur la situation de famille ou la maladie et c’est inacceptable.
Une circulaire toujours plus favorable à l’encadrement :
L’un des objectifs du RIFSEEP était de fondre l’ensemble des primes versées aux agent.es au sein de d’une seule et même indemnité. Bizarrerie lors de sa mise en place au sein des ministères sociaux : la majoration d’encadrement d’un montant compris entre 1200 et 3000 euros versée à certain.es chef.fes avait été écartée de cette opération de toilettage. Désormais, la majoration d’encadrement « précédemment attribuée aux agents exerçant une fonction d’encadrement, sera maintenue et intégrée au dispositif de majoration de l’IFSE en cas de mobilité ascendante sur l’un des postes y ouvrant droit ».
L’administration, via cette nouvelle circulaire introduit le concept de « saut de groupe » très favorable à l’encadrement, puisque dans les cas de mobilité ascendante avec « saut de groupes » dans les ministères sociaux (ex : passage du groupe 3 au groupe 1 de fonction), la circulaire permettrait de cumuler les augmentations forfaitaires prévues pour chaque passage (du groupe 3 au groupe 2, puis du groupe 2 au groupe 1), tandis que- cela existe déjà dans la circulaire actuelle-la valorisation d’un changement de grade est cumulable avec la valorisation liée à une mobilité et « la condition d’occupation du poste de trois ans n’est pas opposable lorsque la mobilité est conditionnée par le changement de grade ». Exemple illustré de cette nouvelle pratique : un.e IT passant RUC dans certains départements et obtenant le grade DAT se verrait gratifié.e d’une revalorisation indemnitaire annuelle de 7000 euros ( 3400 euros au titre du saut de groupe, 600 euros pour le grade et 3000 euros au titre de l’indemnité spécifique RUC).
Et évidemment, on a eu beau la lire plusieurs fois, cette nouvelle circulaire n’introduit aucune mesure favorable pour les agent.es de catégorie B et C
Plus que jamais et comme nous le dénoncions dès sa mise en place, l’IFSE , c’est toujours moins de garantie et de visibilité sur nos rémunérations, qui sont de moins en moins accrochés au déroulement de carrière à l’ancienneté, le tout sur fond d’individualisation des salaires et d’arbitraire: écarts inacceptables entre grades, corps et catégories privilégiant toujours plus l’encadrement au détriment des catégories les moins rémunérées, écarts inacceptables entre les agent.es faisant le lit d’une politique salariale discriminatoire.
L’IFSE crée des inégalités territoriales sans précédent pour des corps identiques occupant les mêmes fonctions dans le même ministère, et ce compte-tenu des prérogatives en matière de rémunération laissées aux potentats locaux : c’est une atteinte à l’égalité de traitement entre les fonctionnaires.
L’administration, qui en a pourtant l’obligation, ne notifie que rarement aux agent.es les évolutions de leur IFSE, tandis qu’aucune consultation réelle n’est menée dans les instances de dialogue social sur les orientations de la politique indemnitaire.
Nous revendiquons :
Une augmentation immédiate de la valeur du point d’indice de 10%, et le rattrapage des pertes accumulées ces dernières années ;
L’indexation de la valeur du point d’indice sur l’inflation ;
L’intégration des primes au traitement indiciaire ;
Le recul de l’administration sur toutes les mesures défavorables aux agent.es introduites par le projet de nouvelle circulaire RIFSEEP ;
Une mesure urgente pour les adjoint.es administratif.ves, seule catégorie à ne pas avoir bénéficié de mesures indemnitaires ces deux dernières années ;
La notification effective de toutes les décisions prises en matière de rémunération aux agent.es
Un plan de transformation massive des emplois de catégorie C en B et de B en A ;
L’accès de tous les contrôleur.es du travail qui le souhaitent au corps de l’inspection du travail.