Prise en charge des violences sexuelles au ministère du travail : LA HONTE !

Depuis quelques années, le Ministère du travail et ses services ne cessent d’adresser des communications sur l’égalité entre les femmes et les hommes, ainsi que sur la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, se targuant de détenir le label « Diversité ».

Ainsi, dernier exemple en date, le 14 septembre, un article intitulé « Égalité F/H : Lutter contre le harcèlement », publié sur l’intranet PACO, rappelait que « selon une enquête Ipsos réalisée en septembre 2022, sur un échantillon de 2 000 actifs, dont des agentes et agents des Ministères Sociaux, 35% des salariés déclarent avoir déjà été victime de harcèlement au travail dont 15% à plusieurs reprises. Ces chiffres sont alarmants et nous devons continuer d’agir ensemble pour mettre fin à ces comportements inacceptables. »

Et d’égrener les mesures du plan égalité 2021-2023 de lutte contre le harcèlement, notamment :

  • Mettre en œuvre le dispositif de signalement des actes de violence, harcèlement, discrimination et agissements sexistes.
  • Assurer un traitement efficace des cas de violences sexistes et sexuelles.
  • Mettre en œuvre la procédure disciplinaire.
  • Préserver les droits des victimes et les protéger.

Mais, confrontés à la réalité, en l’espèce à la plainte d’une agente pour harcèlement sexuel contre son responsable hiérarchique, le Ministère du travail et sa DRH se sont soudainement montrés bien moins volontaristes et, au final, incapables de prendre des mesures pour mettre effectivement fin à l’un de ces « comportements inacceptables » …

En juin dernier, une collègue contractuelle, embauchée en contrat à durée déterminée – nos services ne se privent plus de recourir aux contrats précaires – signalait avoir reçu, pendant sa période d’essai, de nombreux SMS extra-professionnels de la part du Responsable de l’unité de contrôle au sein de laquelle elle est affectée, sur son téléphone personnel, notamment le weekend et à des heures tardives, cherchant manifestement à la convaincre d’entamer une relation « amoureuse ». Elle indiquait également qu’il lui faisait souvent des remarques sur ses tenues vestimentaires, comportement caractéristique de l’objectification des femmes. Après avoir tenté de gérer la situation sans entrer en conflit direct avec lui, elle lui a signifié qu’il devait limiter ses messages au plan strictement professionnel. Des remises en cause sur la qualité de son travail et son implication professionnelle sont alors apparues, sans compter une forme de menace, pas du tout subtile, de s’opposer à la demande qu’elle formulait de pouvoir télétravailler.

Saisie de ces faits, l’administration a réalisé une enquête. Mais elle s’est bien gardée de respecter la procédure de signalement qu’elle a pourtant elle-même définie, par arrêté du 26 mai 2021 (aucune réunion d’étape à mi- enquête avec le/la représentante syndicale assistant l’agent.e, non communication du projet de rapport, information tardive de la plaignante des suites données, … ). Et surtout, elle a conclu, après avoir écarté en toute opportunité le témoignage d’une autre agente indiquant avoir subi dans le passé le même comportement de la part de ce responsable, à… l’absence de harcèlement sexuel !! Des faits répétés, une insistance avérée pour obtenir qu’une agente, en situation de précarité, cède après le « coup de foudre » de son supérieur hiérarchique, une situation évidemment intimidante, puis hostile et enfin offensante… Que faut-il de plus ? Une autre circonstance aggravante ? Peut-être que l’auteur des faits soit particulièrement bien placé pour connaître la réglementation relative à l’interdiction stricte du harcèlement sexuel en étant membre du « système de l’Inspection du travail » ? Oups, c’est bel et bien le cas !

Malgré ces carences, le rapport de l’administration pointe un « comportement inapproprié et grave » et préconise une sanction du deuxième groupe. Or au final, face au refus de la DRH de saisir la CAP, c’est un blâme qu’il serait envisagé de notifier à l’auteur des faits, exfiltré à sa demande, sur un poste « d’expert juridique », créé de toutes pièces pour l’occasion, dans une autre direction, sur un poste où il sera en contact avec davantage de collègues. Une « sanction » aussi faible n’est, à nos yeux, pas à la mesure de la gravité des faits. La décision a été prise en catimini cet été, en dehors de tout conseil de discipline, démontrant que le traitement des violences sexistes et sexuelles est différent des autres agissements.

Ces dernières années, le Ministère du Travail a pourtant su être particulièrement prompt et sévère quand il s’est agi d’engager des procédures disciplinaires, la plupart infondées, contre des agent×es, et notamment des représentant.es syndicaux ! Les chef.fes bénéficieraient-il.elle.s d’un bouclier systématique ? Les exemples sur le terrain du harcèlement moral, notamment, ne manquent malheureusement pas.

Pour nos organisations, ce n’est pas comme ça qu’on agit et ce n’est pas comme ça qu’on peut prétendre viser à « mettre fin à ces comportements inacceptables. »

 

Nous exigeons :

  • Le respect strict de la procédure de signalement définie par l’arrêté du 26 mai 2021 ;
  • L’engagement de procédures disciplinaires contre les auteur.rices de violences sexistes et sexuelles devant la CAP compétente puis des sanctions à la hauteur des faits ;
  • L’organisation de formation à destination des agent.es pour identifier, ne plus subir et dénoncer des propos et agissements sexistes ou sexuels ;
  • L’organisation de formations obligatoires – et pas seulement de vagues opérations de « sensibilisation » – pour tou.tes les encadrant.es sur les violences sexistes et sexuelles, dispensées par des associations féministes, choisies après avis des représentant.es du personnel ;
  • La garantie pour les victimes de bénéficier d’un soutien et, si nécessaire, d’une aide à leur maintien et à leur retour dans l’emploi ainsi que, en premier lieu, de la protection de leur plainte ou témoignage ;
  • L’effectivité de la protection fonctionnelle dans les cas de harcèlement sexuel ;
  • Plus généralement, l’affirmation sans concession que le sexisme est une violence faite aux femmes qui ne sera aucunement toléré dans les services.

 

 Malgré cet état des lieux accablant, nos organisations syndicales restent combatives et se montreront toujours solidaires des victimes. Nous les croyons et appliquons la présomption de sincérité.

N’hésitez pas à vous tourner vers nos militant.es locaux.ales, ou vers une membre de notre réseau de référentes formées sur le sujet, si vous êtes victime ou témoin de violences sexistes ou sexuelles au travail. 

 

PETIT RAPPEL

Puisque notre direction et certain.es collègues ne voient toujours pas la différence entre séduction et harcèlement sexuel :

Lorsqu’une personne souhaite séduire une autre personne, elle a des propos et des comportements positifs et respectueux. Elle est attentive et à l’écoute de ce que cela produit chez l’autre. Les relations souhaitées sont égalitaires et réciproques. Le jeu de la séduction a pour règles : le respect, la réciprocité et l’égalité.

À l’inverse le harceleur ne cherche pas à séduire ou à plaire, il veut imposer ses choix et son pouvoir. Il nie l’autre. Il ne tient pas compte des désirs, des choix, du consentement de l’autre.

En résumé, la séduction est un rapport d’égalité alors que le harcèlement sexuel repose sur un rapport de domination. La victime est mal à l’aise, humiliée, nerveuse, en colère. Elle cherche à éviter de se retrouver avec le harceleur. Les comportements subis créent un climat d’insécurité, de peur et de tension pour la victime. Ils peuvent traumatiser la victime.

Le harcèlement sexuel est constitué même quand le non-consentement n’est pas exprimé explicitement.

Le silence, l’évitement, la gêne ça veut dire NON !

Quand c’est non, c’est non !

Quand il n’y a pas de oui, c’est NON !