Grands évènements sportifs : La DGT contre la convention 81 ?

Communiqué CGT – SUD – CNT

La coupe du Monde de rugby aura lieu en septembre et octobre 2023 sur plusieurs sites en France : Bordeaux, Toulouse, Marseille, Saint-Denis, Lille, Nice, Nantes.

Comme toujours sur ce type d’évènement, l’administration de l’inspection du travail fait preuve d’allégeance à l’égard des entreprises privées et des préfet.es en acceptant que les agent.es de l’inspection du travail soient contraints d’obtenir une accréditation pour pouvoir effectuer leurs contrôles…

Mais cette année la ligne hiérarchique de l’inspection du travail s’est particulièrement illustrée par sa couardise en relayant, avant que la DGT ne rétropédale, l’exigence d’obtention d’accréditation auprès des contrôleur.euses et inspecteur.trices du travail et nécessitant l’envoi d’informations constituant une intrusion inacceptable dans la vie privée des agent.es. :

  • Photo,
  • Nom de naissance,
  • Ville de naissance, Département de naissance, Pays de naissance, Nationalité,
  • Type de pièce d’identité, Numéro de pièce d’identité, Date de délivrance, Date d’expiration,
  • Adresse, Numéro de téléphone,
  • Avez-vous une mobilité réduite et/ou des besoins en matière d’accessibilité ?
  • Avez-vous besoin d’une lettre d’invitation officielle pour votre demande de visa ?

Comment la ligne hiérarchique de l’inspection du travail a-t-elle pu relayer sans mot dire ce type de demande ? Nous n’accepterons pas que l’intervention de nos services soit conditionnée à l’obtention d’une accréditation, et encore moins qu’ils soient contraints pour ce faire de communiquer des informations à caractère personnel !

Les inspecteur.trices et contrôleur.ses du travail, sont des agent.es de l’Etat titulaires, nommé.es par arrêté. Iels disposent, pour justifier de leur identité, d’une carte professionnelle qu’iels peuvent présenter pour effectuer leurs contrôles dans ce type de situation !

Pour relayer ces demandes de la préfecture, la ligne hiérarchique de l’inspection du travail aurait-elle oublié les dispositions de l’article 12 de la convention n°81 de l’OIT et l’article R8124-25 du code du travail, tout aussi clair ?!

Ainsi seule la carte professionnelle peut être exigée et, si nécessaire, les arrêtés d’affectations dans chaque département.

Au demeurant, il n’est pas admissible de permettre à des salarié.es d’entreprises privées, également soumises à notre contrôle et qui font pour certaines, l’objet de PV ou d’enquêtes, d’effectuer un filtre de nos accès sur la base d’accréditations dérogeant aux dispositions légales précitées.

Les enjeux sont de taille : outre la préservation de la vie privée des IT/CT, il s’agit de garantir des conditions de contrôle permettant d’effectuer des constats utiles et efficaces, si nécessaire, sans que l’employeur ne soit prévenu des investigations, conformément à l’article 12 (2) de la convention n°841 de l’OIT : « 2. A l’occasion d’une visite d’inspection, l’inspecteur devra informer de sa présence l’employeur ou son représentant, à moins qu’il n’estime qu’un tel avis risque de porter préjudice à l’efficacité du contrôle ».

La responsabilité de la DGT est lourde en la matière. En effet, dans son instruction du 28 avril 2023 relative à l’organisation du système d’inspection du travail dans le cadre de la coupe du monde de rugby de cette année, la DGT instaure le principe de l’accréditation pour les agent.es de contrôle.

Sans aucun scrupule, elle y indiquait que ce sont les préfectures qui vont gérer la procédure et ainsi obtenir ou non les fameuses accréditations nécessaires à la mission des agent.es de contrôle. Elle fait fi de ses propres lignes directrices relatives aux principes généraux de l’inspection communiquées lors des webinaires de 2022 (« Les services publics de l’inspection du travail devraient être placés sous la supervision directe et exclusive d’une autorité centrale publique; ils ne devraient aucunement être assujettis au contrôle des autorités locales, quelles qu’elles soient, ni avoir un quelconque lien organique avec elles pour l’exécution de leurs tâches ») !

La DGT doit immédiatement revoir ses instructions pour la coupe du monde de rugby 2023 et faire respecter les conventions internationales applicables à l’inspection du travail. Il est hors de question que nous acceptions ce précédent notamment avant les JO 2024 qui se caractérisent déjà par de nombreuses entorses au droit du travail (Retrouvez une position ici : JO : Zone de non-droit du travail )

Les atteintes à l’indépendance de l’inspection du travail se multiplient notamment depuis la mise en place de l’OTE en 2022. L’inspection du travail est traitée à l’instar de tous les corps de fonctionnaires comme des soldat.es devant obéir aux ordres d’un.e directeur.trice départemental.e, aux ordres du préfet. Loin de se positionner en garante protectrice des missions des agent.es, la DGT profite de ce délitement des services de l’Etat pour porter de graves atteintes aux prérogatives de l’inspection du travail au profit du patronat.

Nous avons alerté contre les risques de dérives de cette réforme. Aujourd’hui ces risques se réalisent. Nos organisations syndicales demandent le retrait de la réforme OTE et le retour des services de l’inspection du travail et de ses services support dans un cadre préservant leur indépendance à l’égard de tout changement de gouvernement et vis-à-vis des influences extérieures indues (article 6 de la convention n°81 de l’OIT).

Nos organisations syndicales demandent à la DGT de retirer l’instruction du 28 avril 2023 et plus largement de rappeler aux préfectures que tou.tes les agent.es de contrôle ont la faculté de participer aux contrôles d’entreprises intervenant dans leur département ou région d’affection, que ce soit dans le cadre des grands évènements sportifs ou toute autre situation sur simple présentation de leur carte professionnelle.

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