Le 24 octobre 2014 le journal « La Marne agricole » publie un article signé de la secrétaire générale de la FDSEA de la Marne, intitulé « Contrôleurs vous êtes prévenus » et présentant la photo d’un véhicule sur cales.
Cet article appelle explicitement à la violence contre les collègues. On y lit, en référence à la photo, que « Si un contrôleur s’aventure sur une exploitation telle sera la sanction » et plus loin qu’« une délégation de la FDSEA se déplacera pour accueillir le contrôleur et lui demander de passer son chemin ». Obstacle votre honneur !
Des collègues, à la lecture de l’article, saisissent immédiatement la hiérarchie locale pour qu’elle réagisse et condamne. Et là devinez quoi !
C’est l’histoire d’un RUT qui… saisit le DIRECCTE qui… saisit la DGT qui… échange avec le pôle T de la DIRECCTE qui… échange avec le Préfet… qui échange avec la DGT…qui préfère une réaction du Préfet qui… au final… décide de ne surtout rien faire avant la journée nationale de mobilisation de la FNSEA du 5 novembre et au vu du « climat social très tendu » !
On s’étrangle en lisant cela ! Une « chaine hiérarchique » qui se refuse à toute réaction car le climat social est tendu et ce alors que dans le même temps après 18 mois de conflit social autour de la réforme « Ministère fort » ce même ministre du travail porte plainte contre ses agents pour avoir prétendument abimés une paire de thuyas !
Deux poids, deux mesures qu’on vous dit !
Mais ce n’est pas tout en parallèle à ces péripéties, le pôle T de la DIRECCTE et la FRSEA de Champagne Ardenne engagent un dialogue (certainement social mais surtout pas piqué des hannetons) pour vérifier que les agents de l’inspection du travail sont bien visés (sic !) par le terme « les contrôleurs ».
La FRSEA confirme que l’inspection est visée. C’est gentil. Et le Pôle T d’expliquer tranquillement à la DGT, au DIRECCTE, au RUT que un « horticulteur » est « en émoi » après avoir reçu une « lettre d’observations de plusieurs pages » qui l’a « découragé ». Vite un mouchoir pour l’horticulteur et un guide de méthodologie de contrôle pour les collègues !
La FDSEA voyant que l’esprit de résistance est à l’œuvre au sein de la hiérarchie de la DIRECCTE de Champagne Ardenne pousse son avantage pour indiquer « qu’il serait souhaitable que l’inspection du travail ne fasse pas de contrôle avant le 5 novembre » ! Yaka demander mon colonel. Le 4 novembre le Pôle T de la DIRECCTE envoie sa note bimensuelle dans laquelle en page 1 est écrit « la section agricole suspend quant à elle ses contrôles jusqu’au 5 novembre. La FDSEA a été également amenée à demander la suspension de tous les contrôles ». Non non ce n’est pas un cauchemar, c’est ce qu’écrit la hiérarchie.
Et ces échanges hors sol continuent, le RUT de la Marne allant jusqu’à écrire que « Il a été décidé dans un esprit de responsabilité et de sécurité pour l’inspection du travail de ne pas réagir » !
Et c’est pas (encore) fini !
48 heures avant l’action de la FNSEA du 5 novembre, le préfet, conscient qu’il faut baisser le temps de travail sans baisser les salaires, décide de fermer les administrations de Châlons-en-Champagne (préfecture de région) et d’offrir une journée de congés payés à l’ensemble des agents publics.
Et ce qui devait arriva, le 5 novembre les agriculteurs saccagent différentes administrations dont la DIRECCTE (mur de béton, tags, fumier déversé et même des œufs toujours présent sur la façade deux semaines après les faits !) sans aucune réaction.
Deux poids, deux mesures qu’ont vous dit !
Le 6 au matin… toujours rien… absolument rien. Les collègues sont informés par la CGT. La ligne hiérarchique, toute la ligne, rien que la ligne est officiellement saisie. La presse aussi. Les réactions de soutien affluent de tout le ministère. La presse locale, régionale et nationale relaie l’information.
Mais la hiérarchie reste introuvable. Et puis et puis… vers 18h00 : communiqué du ministre, du DGT, du DRH, du DIRECCTE… stop stop c’est trop ! Évidemment, ils condamnent et soutiennent – mais le soutien s’adresse non à des agents qui ont effectivement été menacé mais qui « se sont sentis » menacés !
Cerise sur le gâteau, Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, annonçait le même jour (5 novembre 2014) le lancement d’une mission visant à « dresser un état des lieux des contrôles en exploitation agricole au titre des différentes réglementations » afin de « simplifier et rendre plus acceptables » ces contrôles !
Il aura fallu une intervention déterminée de la section locale CGT pour obtenir une réaction publique. Aucune gloriole pour nous, c’est même plutôt pitoyable pour nos chefaillons quand on regarde l’histoire avec un peu de recul, 10 ans exactement après l’assassinat de nos collègues à Saussignac.
La CGT ne s’arrêtera pas là. Elle a rencontré le Préfet et le DIRECCTE le 12 novembre 2014. Elle demande, en lien avec l’union départementale CGT, que l’Etat employeur porte plainte et que des mesures concrètes soient prises pour les agents.