Déclaration préalable commune au CTM Travail-Emploi du 9 novembre 2022

Déclaration CGT – SUD – FSU

Nous voici reconvoqué.es, alors que nos organisations ont décidé de ne pas siéger dans le cadre de la réunion du Comité Technique Ministériel Travail – Emploi convoqué les 20 et 21 octobre. Avons-nous été entendu.es ? Manifestement pas puisque l’ordre du jour n’a pas évolué, malgré nos nombreuses demandes. Certains points ne sont même pas documentés ! Nous le disons une fois de plus : les points doivent être documentés pour être correctement préparés. Et que dire de la date choisie : prévue sur une journée et demie, la réunion se concentre finalement sur une seule journée, nécessairement « marathon » et… un mercredi ! Là aussi, nous nous répétons : éviter le mercredi pour l’organisation des réunions est un principe auquel le Ministère du travail ne doit pas se permettre de déroger, pour oeuvrer à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, ainsi qu’au meilleur équilibre vie professionnelle / vie personnelle des agent.es ! Il s’agit de l’un des rares engagements, si ce n’est le seul, pris par votre prédécesseur qui était respecté jusqu’à présent ; nous ne pouvons que le déplorer.

Passé ce préalable, nous souhaitons bien entendu revenir sur la décision rendue par le Tribunal Administratif de Nancy annulant purement et simplement la sanction absurde infligée à notre collègue Anthony Smith. Nous le disons depuis le début : notre collègue n’a fait que son travail, au bénéfice de la santé et de la sécurité des travailleur.ses et il n’avait pas à être sanctionné ! Le tribunal considère que, dans cette affaire, des instructions entravant l’organisation ou la conduite des contrôles ont été données. Quelles conséquences l’administration tire-t-elle de ce jugement ? Comment seront sanctionnés les responsables de ces instructions ayant entravé l’action de l’Inspection du travail pendant la crise sanitaire ? L’heure des comptes et du bilan a sonné ! Le silence de la DGT sur ce dossier est assourdissant !

Outre le camouflet que représente le jugement du Tribunal Administratif de Nancy, sans parler de la récente condamnation pour diffamation contre une Inspectrice du travail des anciens DGT et DGT adjoint, la DGT a pourtant vraiment matière à se remettre en question, comme le démontre l’enquête sur le PNA et à revenir à ses missions essentielles et utiles : l’appui aux agents de contrôle, via la production d’outils pratiques et méthodologiques, ainsi qu’en répondant rapidement aux questions juridiques les plus pointues.

S’agissant de l’enquête sur le PNA, nous notons que la DGT se contente de nous transmettre des éléments quantitatifs, sans synthèse des réponses « libres » ou propositions formulées par les répondant.es. Une présentation aux agent.es de contrôle est prévue dès demain par « webinaire » et nous doutons que cette présentation soit aussi limitée que le document qui nous a été transmis. Nous notons une très faible participation, guère étonnante vue la période choisie et le fiasco du 1er envoi mail, mais un rejet très largement majoritaire parmi les agent.es de contrôle de la « politique travail » et des priorités actuelles, tant sur le fond que sur la forme.

Nous notons enfin un réel décrochage entre les agent.es de contrôle, d’un côté et les encadrant.es, d’un autre côté. Il est urgent d’agir, d’admettre le fiasco du « système » d’inspection du travail, tel que pensé dans le cadre de la réforme « Ministère fort » et de revenir aux fondamentaux de l’inspection du travail. L’IGAS ferait sans doute mieux d’analyser les causes de ce fiasco plutôt que d’éplucher les chrono de nos collègues de Seine St Denis, épuisé.es par des années de sous-effectifs et d’intérims structurels !

Au menu de ce CTM, doivent nous être présentés le projet de loi de finances pour 2023 et les moyens du ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion. Alors que le gouvernement zappe le débat parlementaire en usant et abusant des dispositions de l’article 49-3 de la Constitution, nous comprenons qu’il s’agit d’une présentation de pure forme et que tout ce que nous dirons n’aura strictement aucun effet. Un travail très important a pourtant été réalisé par la Commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale (avis n°364 du 19 octobre 2022) et il nous paraît particulièrement pertinent. Nous ne sommes pas dupes : les crédits de la mission « Travail Emploi » sont en hausse, mais cette hausse est à relativiser puisque l’essentiel correspond à des aides aux entreprises ! Il ne s’agit ni de recruter, ni de développer nos missions, ni d’améliorer nos conditions de travail ou de rémunération.

Le « BOP 155 » qui comprend l’intégralité des crédits de personnel de la mission Travail et Emploi est d’ailleurs évidemment celui dont la hausse est la plus réduite, à 4%. Ce sera bien évidemment très insuffisant pour répondre à la situation de crise dans laquelle se retrouvent nos services, à l’issue des réformes successives et en ayant subi de telles coupes dans les effectifs : moins 20% d’électeur.trices pour le CTM Travail – Emploi depuis 2018 ! Sur la même période, les effectifs des agents de contrôle ont fondu de 13% ! Nous ne sommes évidemment pas assez nombreux.ses pour assumer correctement nos missions de service public et la réforme « Ministère fort » a aggravé le problème en ne compensant pas les départs cumulés des inspecteur.trice.s et des contrôleur.ses du travail. Les chiffres transmis dans le cadre de la réunion d’aujourd’hui, associés aux difficultés avérées de recrutement, ne nous permettent pas d’apercevoir le bout du tunnel ! 376 sections vacantes, c’est près de 20 % du territoire non couvert et près de 40% du territoire mal couvert puisqu’une section en intérim est prise en charge par un.e agent.e qui ne peut plus être présent sur son propre poste comme il.elle le devrait. Quant aux chiffres des recrutements prévus, ils ne résoudront rien puisqu’ils ne compensent toujours pas les départs prévisionnels en retraite IT (394) et CT (236 – chiffre qui ne figure étonnamment pas dans votre document) cumulés : 630 sur la période 2022 – 2024.

Les chiffres sont particulièrement éloquents, mais derrière ces chiffres, il y a des déséquilibres entre les régions et les départements et certaines situations sont particulièrement catastrophiques, avec des agent.es dans une situation de souffrance extrême. Nous venons de recevoir un signalement sur la situation dans le département du Cher : le département comptait 10 sections, il n’en compte plus que 8, seules deux de ces sections sont pourvues et une collègue est en arrêt maladie. Nous vous laissons faire le compte : une seule agente de contrôle pour le département, noyée sous les dossiers et les demandes en souffrance ! Que comptez-vous faire ? Pas en 2023, pas en 2024… Maintenant !!

Nous le dénonçons depuis des années et le rapport de la Commission des affaires sociales n’a pu que le constater : nos conditions d’exercice « se dégradent dangereusement du fait de l’insuffisance des moyens humains et matériels ». Nous sommes particulièrement inquièt.es à la lecture du compte-rendu de l’audition du Ministre : s’il reconnaît les problèmes, les solutions envisagées – une nouvelle réforme qui signerait la fin de la section territoriale d’inspection ou le recrutement de contractuel.les – sont à l’opposé de nos revendications ! Le nombre des sections d’inspection doit être considérablement augmenté et sanctuarisé par arrêté ministériel ; les effectifs affectés au contrôle doivent être renforcés par des recrutements massifs et la réorientation des postes de RUC au contrôle des entreprises.

S’agissant des recrutements de contractuel.les en cours au sein des unités de contrôle, nous nous y opposons fermement : cela ne résout en aucun cas le problème des intérims structurels ! L’activité d’un agent de contrôle ne peut pas être sous-traitée ou saucissonnée comme vous semblez le croire ! Par ailleurs, s’il s’agit d’appui au contrôle : que reste-t-il aux RUC dont la grande majorité ne sont pas inspectant et aux cellules des Pôles T ? Quant à votre argument sur une forme de pré-recrutement, les amateur.trice.s d’humour noir apprécieront sans doute : pensez-vous vraiment que se retrouver dans les équipes les plus en difficultés, avec des missions mal définies, donnera envie à de jeunes diplômé.es de présenter le concours ? Plus fondamentalement, ce recrutement nous paraît totalement contradictoire avec les dispositions de l’article 6 de la convention n°81 de l’OIT dont il est toujours bon d’avoir rappel :

« Le personnel de l’inspection sera composé de fonctionnaires publics dont le statut et les conditions de service leur assurent la stabilité dans leur emploi et les rendent indépendants de tout changement de gouvernement et de toute influence extérieure indue. »

Le recours à l’emploi précaire n’est pas réservé à l’inspection du travail qui arrive finalement en bout de course, après la multiplication des recrutements précaires à l’emploi, dans les services d’accueil et dans les secrétariats, tant nos services sont exsangues. Tou.te.s ces collègues contractuel.les qui sont ou arrivent dans nos services sont maltraité.es et sous-payés, privé.es de toutes les garanties statuaires et du régime indemnitaire dévolu aux titulaires. Après des mois à vous le réclamer, non sans mal, puisque nous avons été contraint.es d’engager une procédure CADA, vous nous avez communiqué le référentiel des rémunérations pour les agent.es contractuel.les, qui ne concernent que les personnels d’administration centrale et de la DRIEETS IDF. Existe-t-il un tel référentiel pour les agent.es contractuel.les en DDETS ? Le cas échéant, nous vous demandons de nous le communiquer !

Mais en effet, être fonctionnaire ne fait plus rêver… Comment être surpris ? Après tant d’années de sabotage et de dénigrement ? Avec des salaires qui n’évoluent quasiment pas ? Pour des millions d’agent.es relevant de la catégorie C (45% de la fonction publique), majoritairement des femmes, c’est la double peine : des salaires bien trop faibles à peine plus élevés que le SMIC, et ce désormais pendant de longues années. Les 7 premiers échelons sont rémunérés au même indice 352, privant ces dernièr.es d’augmentation de salaire sur les 10 premières années de leur carrière. Qu’en est-il des mesures indiciaires et la bonification d’un an pour les agent.es de catégorie C, décidés en janvier 2022 et toujours pas mis en oeuvre ? Les agent.es attendent plus que jamais ces quelques miettes promises il y a déjà longtemps.

Toujours côté rémunération, dans un courrier adressé aux agent.es de l’Inspection du Travail, le ministre annonce une revalorisation des planchers IFSE pour le corps des inspecteurs du Travail et des contrôleurs du Travail, qui fait la part belle, une nouvelle fois aux responsables d’unité de contrôle, après la NBI, après le grade sommital pour les DAT, avec une indemnité spécifique de 3000 euros annuellement. Face à cela, pour les contrôleurs du travail qui n’ont bénéficié de rien du tout depuis la mise en oeuvre du Ministère fort, vous n’accordez que peu de choses. Et non sans provocation, le ministre indique dans son courrier « ne pas oublier les catégories C », en n’annonçant rien du tout, alors même que ces agent.es ont été exclu.es du dispositif de convergence indemnitaire en 2022. Sur ce point, lors des derniers CTM, vous nous indiquiez retravailler sur les planchers IFSE des corps interministériels A,B, C. Qu’en est-il à ce jour ? Nous exigeons d’être consulté.es sur votre politique indemnitaire. En parallèle, nous dénonçons les économies de bout de chandelle que le ministère effectue au détriment des agent-es reclassé-es dans le cadre de la réforme de l’OTE : en Île-de-France, le bénéfice de l’indemnité de restructuration est subordonné au suivi d’une formation au nouveau poste d’au moins 5 jours… alors que les formations proposées par l’INTEFP ou la préfecture ont une durée inférieure… quand elle existe ! Nous exigeons le versement des indemnités dues sans conditions.

Plus globalement, suite aux premières annonces du Ministre et alors que nous collègues sont mobilisé.es pour l’augmentation des salaires, nous exigeons l’ouverture de réelles négociations, autour de nos revendications.

Le projet de loi de finances le démontre, si nous en avions besoin : le gouvernement se refuse toujours à augmenter les traitements, alors que ces derniers décrochent face à l’inflation galopante qui grève de plus en plus le budget des fonctionnaires. Le ministre de la fonction publique renvoie à début 2023 les négociations sur les salaires. Il est pourtant urgent d’agir dans le contexte d’une nouvelle année marquée, comme depuis 20 ans, par une diminution de nos traitements face à la hausse des prix, et malgré le relèvement de 3, 5% du point d’indice. D’ici là en effet, l’inflation aura eu le temps de continuer à grimper, et les fonctionnaires se seront un peu plus appauvris encore.

Le 26 octobre dernier, E. Macron a tenu à préciser les orientations de sa politique sociale et économique et c’est la guerre sociale qu’il annonce. Il se refuse toujours à indexer les salaires sur l’inflation mais déroule un programme très brutal contre les travailleur.ses et les plus faibles de ce pays : réforme de l’assurance chômage, recul confirmé de l’âge de départ en retraite jusqu’à 65 ans, et dureté avec les travailleur.ses sans papiers, à qui l’on promet une chasse sans précédent. Iels vivent ici, bossent ici, iels doivent être régularisé.es !

Enfin, nous vous demandons, Mme la DRH, de répondre à nos demandes et, au moins d’en accuser réception. Certains dossiers sont en souffrance depuis de nombreux mois et l’attente est longue pour les collègues concerné·es. Nous vous ferons grâce de la longue liste des sujets sur lesquels l’administration devait « revenir vers nous » au cours de la mandature. Nous développons un exemple qui nous semble très significatif, avec les éléments chronologiques, celui des suites apportées à l’agression de l’un de nos collègues par le DDETS adjoint de Gironde :

  • Le 25 mars 2021, nous évoquons l’agression d’un représentant de SUD par le DDETS adjoint de Gironde. P.Bernard, alors DRH, annonce une enquête et reviendra vers les OS très vite.
  • Le 11 mai 2021, le DRH nous dit qu’il revient vers nous la semaine prochaine.
  • Le 21 octobre 2021, le Dr Josse nous informe qu’il attend un retour du CHSCT local qu’il n’a pas encore, mais revient vers nous dès que possible.
  • Le 2 février 2022, nous demandons où en est cette histoire. La DRH nous promet de s’informer et de revenir vers nous sans tarder. Ce qui n’est toujours pas fait…au 9 novembre 2022.

Nous pourrions multiplier les exemples ! Nous jouons notre rôle en vous alertant sur des situations totalement bloquées localement, sur des sujets importants (non versement de primes dues, situations avérées de discrimination, absence de resoclage pour des collègues mutés en 2020, …) et les mois passent, sans réponse de votre part.

Sur le recours indemnitaire des IET/ ITS, nous approchons du délai de deux mois et les collègues et les OS attendent une réponse expresse de vos services, comme vous vous y étiez engagée.

Sur les déménagements, projet de « densification », de regroupement, avec leur cohorte de mètres carrés en moins, d’open space et de dégradation des conditions de travail, Là encore silence radio de la DRH… Malgré une protestation inédite des collègues d’administration centrale, le déménagement sur le site TODS est prévu fin mars 2023.

Trop, c’est trop : nous appelons nos collègues à se mobiliser, dès demain, en rejoignant les mouvements de grève qui doivent faire tâche d’huile et les manifestations, pour revendiquer :

– Une augmentation immédiate de la valeur du point d’indice de 10%, et l’ouverture de négociations sur le rattrapage des pertes accumulées ces dernières années ; l’indexation de la valeur du point d’indice sur l’inflation ;

– Un plan de rattrapage des inégalités salariales entre les femmes et les hommes ;

– Un plan de titularisation immédiat de l’ensemble des non-titulaires occupant des postes permanents avec les moyens financiers nécessaires à la création des postes correspondants ;

– Un plan de recrutement massif d’agents publics titulaires au ministère du travail afin de répondre à nos missions de service public ;

– Le passage en CDI à 100% et l’alignement des salaires et des primes sur la grille des titulaires de tout.es les agent.es non titulaires sur des postes permanents, en attendant leur titularisation ;

– Un plan de transformation massive des emplois de catégorie C en B et de B en A ;

– L’accès de tous les contrôleur.es du travail qui le souhaitent au corps de l’inspection du travail