La crise sanitaire liée au Covid-19 s’accélère au point que les pouvoirs publics, après avoir décidé la fermeture des lieux de vie non essentiels, envisagent prochainement des mesures de confinement de certaines régions.
Or, alors que les restaurants, les cinémas et les bars sont fermés dans tout le pays, l’administration du travail s’avère dans l’incapacité de donner des consignes claires et univoques aux agent-es placés sous sa tutelle. Ainsi, en même temps qu’elle enjoint les agent-es à privilégier le télétravail, à ne pas s’exposer inutilement et à limiter leurs déplacements ainsi que les contacts directs et prolongés avec les personnes, les services restent officiellement ouverts et, dans certains départements et régions, l’accueil physique des usagers perdure.
Il est notamment demandé aux agent-es qui ne peuvent pas travailler à distance parce que leurs missions ne sont pas télétravaillables et qui contribuent à l’exercice des missions identifiées comme essentielles de se rendre sur leur lieu de travail usuel. Il est également demandé aux agent-es du service des renseignement de continuer à assurer l’accueil physique du public « pour les situations d’urgence à traiter ». De même, dans le cadre de l’instruction des demandes d’autorisation de licenciement, les agent-es de contrôle doivent, dès que cela est « nécessaire », continuer de procéder en présentiel à l’audition personnelle et individuelle des parties « en respectant les mesures barrières et d’hygiène ».
Ces injonctions contradictoires entretiennent la confusion et l’incompréhension dans les services.
Par ailleurs, l’administration ne donne aucune consigne vraiment précise concernant les modalités pratiques et organisationnelles permettant la mise en œuvre concrète des mesures conservatoires qu’elle a elle-même édictées. Notamment, faute de moyens techniques permettant à l’ensemble des collègues de travailler à domicile, et d’instructions claires et univoques en ce sens, certain-es agent-es se trouvent exposés inutilement sans que cela soit nécessairement justifié par le contenu intrinsèque de leurs missions.
L’administration ne communique pas plus clairement auprès des usager-es du service public alors que cela apparaît indispensable, d’une part, pour permettre aux usagers de s’orienter dans la nouvelle organisation mise en place et, d’autre part, pour éviter des sollicitations superflues qui exposeraient inutilement les agent-es des services.
Enfin, les consignes sont actuellement déclinées de façon très hétérogène selon les départements et les régions. Ainsi, le DIRECCTE IDF précise, dans un mail du 15 mars, que l’homologation des ruptures conventionnelles collectives et individuelles ainsi que l’instruction des demandes d’autorisation de licenciement des salarié-es protégé-es restent une priorité essentielle alors que, dans le Rhône, il est demandé ce lundi aux agent-es de prendre contact avec l’employeur pour « suspendre la procédure ».
Cette cacophonie expose inutilement nos collègues qui sont encore nombreux à s’être déplacés ce matin, en transport en commun, pour se rendre sur leur lieu de travail.
Dans certaines UD aucune communication n’a été faite par la direction dans la journée du 16 mars, laissant les collègues à l’abandon.
Par ailleurs, l’instruction DGT relative à l’organisation et à la continuité de l’activité des services d’inspection du travail, fait état d’un périmètre très large de missions prioritaires. Pour ce qui est des missions de contrôle par exemple, les activités identifiées par la DGT comme « essentielles » englobent aussi bien les enquêtes AT, les suites données au droit d’alerte, les atteintes à l’intégrité physique et morale que les atteintes aux droits fondamentaux (discriminations, liberté syndicale, entrave IRP, travail non déclaré/fraude PSI …) et le traitement « au bureau » des plaintes relatives dont l’objet ne se rapporte pas aux priorités visées plus haut.
Mais on comprend mal pourquoi on exposerait les agent-es inutilement pour les demandes qui ne revêtent pas un caractère d’urgence tel que leur traitement ne puisse être raisonnablement différé. En outre, le gouvernement ne saurait demander à ses agent-es de s’exposer au nom de la continuité du service tout en permettant dans le même temps à des productions de biens et services non vitales, tels les chantiers du bâtiment, de se poursuivre.
En ces circonstances exceptionnelles, nous vous appelons à prendre la seule décision à même de garantir la santé de toutes et de tous et le ralentissement de la propagation du virus, à savoir la fermeture totale des services sur l’ensemble du territoire national.
Les activités considérées comme essentielles par l’administration – notamment l’activité partielle, une permanence pour les informations en droit du travail et l’inspection – doivent être exercées à distance.
A cet effet, nous vous demandons de prendre, par tous moyens, les mesures techniques et organisationnelles appropriées, notamment les mesures suivantes :
- permettre à l’ensemble des agent-es dont les missions ont été identifiées comme essentielles de travailler depuis leur domicile, au besoin en étendant les modalités d’accès et de connexion à Orion et/ou au VPN ;
- mettre en place les canaux de communication adaptés, notamment le routage des appels ;
- dispenser aux usagers une information claire sur la réduction de nos activités et sur la manière de contacter nos services en cette période de crise exceptionnelle ;
- limiter les missions prioritaires aux situations véritablement graves et urgentes dont le traitement ne peut effectivement être différé.
Les décisions arrêtées devront être mises en œuvre de façon homogène et concertée sur l’ensemble du territoire national.
Par ailleurs, les agent-es qui seraient conduits à être en contact avec le public, d’une manière ou d’une autre, devront être équipés sans délai d’équipements de protection individuel adaptés.
Enfin, nous demandons l’organisation, en visioconférence, d’une CTM et d’un CHSCT-M extraordinaire sur le sujet.
Nous appelons les collègues à rentrer et à rester chez eux.
Nous revendiquons :
- la neutralisation du jour de carence pour les collègues en arrêt ;
- l’octroi d’autorisations d’absence pour l’ensemble des collègues qui ne pourraient pas ou plus télétravailler ;
- aucun retrait de JRTT pour les collègues placés en autorisation spéciale d’absence.
En l’absence de consignes adéquates et homogènes, nous soutiendrons tous les agent-es qui refuseraient de se rendre sur leur lieu de travail habituel ou sur site du fait des carences organisationnelles dont l’administration est comptable.