Protocole de déconfinement : Macron et Pénicaud mettent en danger des millions de salarié-es

Le ministère du travail a publié dimanche 3 mai sur son site internet un « Protocole nationale de déconfinement pour les entreprises pour assurer la santé et la sécurité des salariés ». Derrière une appellation qui fait croire à des mesures contraignantes pour les employeurs, se prépare en réalité la mise en danger de millions de salarié-es pour faciliter la remise en route des profits.

Depuis le début de la pandémie, Macron, Pénicaud et cie s’acharnent à effacer le code du travail derrière une prétendue « politique sanitaire » et à le remplacer par une kyrielle de « fiches métiers » et autres « guides » souvent coproduits avec le patronat intéressé. Ces documents visent à substituer à l’obligation de sécurité, qui pèse sur l’employeur-euse, des « bonnes pratiques » (notamment les fameux gestes barrières) dont les salarié-es seraient tout autant comptables du bon respect. En l’état du droit, les chef-fes d’entreprise sont en effet responsables sur le plan civil et pénal des contaminations sur le lieu de travail, sauf à démontrer qu’ils/elles ont tout mis en œuvre pour les éviter, et ne peuvent reporter cette responsabilité sur les salarié-es.

Conscient de cet enjeu, le patronat réclame une modification de la loi qui le mette à l’abri des poursuites et a déjà obtenu un vote favorable au Sénat. Si le gouvernement rejette cette solution à ce stade, c’est uniquement parce qu’il estime que le matraquage de ses fiches, guides et recommandations au rabais suffira à protéger les premiers de cordée. Car pour le reste, il a démontré avec ses ordonnances qu’il avait décidé de se saisir du prétexte de la lutte contre la pandémie pour continuer à dynamiter le code du travail : ordonnances remettant en cause les règles relatives à la durée maximale du travail, à la prise des congés payés, et encore tout dernièrement ordonnance réduisant les délais de consultation des CSE (dans certains cas de 3 mois à 12 jours).

Le protocole de déconfinement se situe en droite ligne de ces tentatives, et on n’y trouvera donc aucune référence explicite aux dispositions légales et réglementaires relatives à la santé et à la sécurité au travail. En lieu et place le gouvernement invente des références, telle celle d’un espace de 4m2 par salarié-e, qui n’auront aucune valeur contraignante pour les employeur-euses et qui peuvent être moins favorable aux travailleur-euses que d’autres normes ou recommandations en vigueur. Ainsi concernant les espaces de travail en bureaux la norme AFNOR NFX 35-102 préconise 10m2 par personne que le bureau soit individuel ou collectif, et 15m2 par personne dans un espace collectif bruyant. Cherchez l’erreur… Ou encore : le nettoyage des surfaces et locaux n’est plus recommandé que de façon « quotidienne » sans préciser les fréquences alors que dans le bâtiment les patron-nes s’étaient mis d’accord avec le ministère du travail pour un nettoyage toutes les deux heures. Exit aussi la désinfection systématique avec produit virucide.

Le respect des gestes barrières et de la distance d’un mètre est martelé comme l’alpha et l’omega de la prévention, alors que de nombreux médecins alertent sur le fait que cette distance est insuffisante pour protéger du risque de contamination par diffusion aéroportée ou par aérosols.

Enfin le protocole exclut le port systématique de masques par les salarié-es, arguant que les équipements de protection individuelle ne doivent pas se substituer aux mesures d’organisation du travail. Le gouvernement semble là s’appuyer sur les dispositions du code du travail qui donnent la primauté aux mesures de protections collectives par rapport aux mesures individuelles. Mais étant donné que les mesures d’organisation recommandées sont notoirement insuffisantes , il s’agit en fait d’un quitus délivré aux employeur-euses pour exposer d’avantage encore les salarié-es. Le document concède que des masques doivent être fournis si la distance d’un mètre ne peut être respectée au vu des activités de l’entreprise, mais pour préciser immédiatement qu’il doit alors s’agir de masques dits « grands publics », les masques FFP et chirurgicaux étant prétendument « réservés » au personnel soignant. Le mensonge d’Etat continue donc pour éviter de reconnaître la pénurie de réels équipements de protection et l’incurie du gouvernement : les masques dits « grands publics » ne répondent à aucune norme ou certification et ne sont pas des équipements de protection, leur efficacité n’est absolument pas démontrée. D’ailleurs, en 2009, dans le cadre de la pandémie H1N1, le Directeur général du travail recommandait par circulaire officielle  le port de masques FFP2, les seuls à pouvoir être qualifiés d’équipement de protection respiratoire, pour les salarié-es en contact étroit avec du public.

Par ce protocole de déconfinement, ce sont donc des millions de salarié-es qui vont être exposé-es à une contamination au COVID 19 avec le blanc-seing du ministère du travail, et en court-circuitage total de l’inspection du travail qui par ses constats de terrain a pour mission d’assurer la protection de la santé et de la sécurité au travail.

La CGT-TEFP, premier syndicat des agent-es du ministère du travail, demande le retrait de ce document, comme de tous les guides et fiches qui dénaturent, tronquent et affaiblissent les règles énoncées par le code du travail. Elle exige plus que jamais l’arrêt de la politique criminelle de mise en dangers des salarié-es que mène ce gouvernement. Elle exige que la réglementation du code du travail sur les risques biologiques soit renforcée et assortie de sanctions dissuasives et de moyens de contrôle (comme un arrêt d’activité par l’inspection du travail comme cela existe pour les machines dangereuses).

Elle apporte tout son soutien aux salarié-es qui avec leurs syndicats revendiquent dans tous les secteurs et toutes les entreprises les moyens nécessaires, indispensables pour protéger leur santé, leur sécurité et leurs conditions sociales.