Déclaration des élu/es CGT au CHSCTM du 9 février 2018

Monsieur le Président du CHSCTM,

Cette première réunion de l’année 2018 intervient dans un contexte d’une attaque sans précédent du statut de la Fonction Publique (avec dernièrement le « plan Action publique 2022 » qui prévoit un « plan de départs volontaires » massif pour les fonctionnaires).

La réunion du CHSCTM de ce vendredi 9 février 2018 s’ouvre sur le constat, malheureusement renouvelé, que l’état des services au sein du Ministère ne cesse de se dégrader, sous le coup des réformes successives et de la baisse continue des effectifs, ayant pour effet de déstabiliser et fragiliser toujours un peu plus les agent.es.

Les résultats des expertises qui sont présentées ce jour pour information au CHSCTM en témoignent.

Ainsi, au sein des services emploi, qui ont connu depuis plusieurs années des évolutions et réformes importantes, l’expertise relève l’existence d’« un climat social marqué par un fort niveau d’inquiétude des agents, des conditions de travail détériorées, et de nombreuses situations de souffrance au travail déclarées ». Dans les deux régions expertisées, le Grand-Est et les Pays-de-la-Loire, l’expert note que
les statistiques d’arrêt maladie sont en progression et que deux catégories de postes sont particulièrement fragilisées, les CDET et les chefs de services.

Il insiste sur la nécessité de stabiliser les effectifs en UR et en UD sur le champ emploi, et conclut que de ce point préalable qu’est la préservation des moyens humains, dépend la faisabilité de toutes les autres préconisations (renforcement de l’accompagnement managérial, mise en place de réseaux d’échange de pratiques, renforcement des collectifs de travail…).

Au sein des services de renseignements, l’expert ne fait pas un autre constat. Au-delà du constat de la grande hétérogénéité de l’organisation de ces services, et de la nécessité de leur conserver une large part d’autonomie dans l’organisation (pour les modalités de réception du public – par téléphone, par rendez-vous –, la gestion des plages horaires,…), le rapport d’expertise souligne qu’alors que les conditions d’exercice des activités sont déjà très tendues, c’est la « capacité même des services de renseignements à réaliser le service qui est engagée, et à très court terme ».

En effet, d’ici 2022, ce sont 47% des agent.es des services de renseignements qui sont susceptibles de partir à la retraite, soit 289 agent.es dont 240 contrôleurs. Selon le rapport, « sans politique de recrutement ou de mobilité plus volontariste, il y a un risque tel sur la qualité de service que se posera de facto la question de la pérennité de l’activité. Le remplacement des effectifs partant à la retraite, sous réserve de rendre le métier attractif, permettrait de sécuriser cette situation ».

Pourtant, comme le relève l’expert, le projet national d’instruction ne contient aucune stratégie pour répondre à la priorité qui est celle des effectifs.

Les constats réalisés par le cabinet d’expertise confirment nos propres constats et la situation de risques à laquelle sont soumis nos collègues de ces services. Plus surprenant est l’absence de présentation de tout plan d’actions de l’administration pour combattre les risques exposés dans les deux rapports alors que vos services ont connaissance des constats des experts depuis la fin du mois de novembre 2017.

Face à cette situation, nous ne pouvons qu’exiger l’élaboration urgente de mesures de prévention en réponse aux deux expertises qui devront être soumises pour consultation au CHSCTM ainsi que la transmission du nouveau projet d’instruction DGT sur les renseignements.

A l’inspection du travail, les agent.es subissent également les réductions d’effectifs, avec des redécoupages de sections depuis plusieurs mois, région après région, entrainant la désorganisation des services, des surcharges de travail liées à des situations d’intérim permanentes et récurrentes, et une grande démotivation. Sans par ailleurs que pour ces services, le ministère ou les DIRECCTE ne jugent utiles de procéder à une évaluation des risques qui sont générés par ces réorganisations multiples… Bien au contraire, puisque lorsque des CHSCT, comme dans le Val-d’Oise ou les Hauts-de-Seine, votent une expertise, à défaut de disposer d’éléments d’analyse pour pouvoir se prononcer lors de leur consultation, ces expertises sont refusées…

Votre nouveau refus d’inscrire à l’ordre du jour de ce CHSCTM la question des réorganisations et de la charge de travail au sein des services d’inspection du travail confirme que la prévention des risques relève plus d’une posture que d’une préoccupation réelle.

Plus surprenant encore est le refus d’inscrire à l’ordre du jour le point demandé concernant le risque d’exposition à l’amiante. La parution d’un guide amiante bâtimentaire dans lequel une partie des propositions des membres du CHSCTM a été intégrée, n’est pas suffisante face à un risque d’exposition passive à l’amiante non maîtrisé.

Les échanges lors de la réunion du 31 janvier dernier, entre la DRH, le DIRECCTE Pays-de-La-Loire et les représentants CGT, SUD et SNUTEFE concernant la Tour Bretagne à Nantes ont confirmé que l’administration est encore actuellement défaillante dans la gestion du dossier et que nos collègues ne sont pas protégés comme il le faudrait.

D’autres situations d’expositions passives sont à craindre et il n’y a pas qu’à Nantes que les dossiers techniques amiante et l’évaluation des risques d’exposition sont fantaisistes. La DRH ne peut pas se contenter de renvoyer à la responsabilité des DIRECCTE. Puisqu’il est question de vie ou de mort de nos collègues, la DRH doit prendre ses responsabilités en tant qu’employeur et prendre les mesures de protection qui s’imposent.

Pour en finir avec les points que l’administration a refusé de mettre du jour, nous constatons que notre demande de présentation d’un plan de prévention des violences sexistes et sexuelles, n’a pas été retenue…

Face à ces différents constats, ce ne sont certainement pas les déclarations de la ministre du travail lors de sa rencontre au mois de janvier dernier avec l’intersyndicale du ministère qui sont faits pour rassurer : elle n’a annoncé pour l’avenir que réductions d’effectifs, refonte des missions à travers le projet 3MO, transfert à d’autres opérateurs publics ou privés des missions qui « font doublon », et renforcement de la chaine hiérarchique…

La ministre du travail a donc beau jeu de se féliciter du travail réalisé par le CHSCTM, avec les études et expertises menées sur la réforme territoriale, le télétravail, ou encore celles présentées aujourd’hui pour les services emploi et les services de renseignements, puisqu’elle n’a manifestement aucune intention, au vu de ses annonces, de mettre en œuvre les préconisations qui y sont formulées en terme d’effectifs et de préservation des collectifs de travail, qui sont pourtant qualifiées de primordiales par les experts.

Enfin, ce ne sont pas non plus les orientations stratégiques ministérielles en matière de prévention des risques professionnels pour 2018, que vous soumettez au débat du CHSCTM ce jour, qui vont permettre de répondre aux problématiques rappelées ci-dessus.

Dans ce document, vous vous contentez en effet de lister des actions, sans budget et moyens alloués pour leur mise en œuvre réelle dans les services. D’ailleurs, si certaines de ces actions, qui étaient déjà prioritaires en 2017 (par exemple l’animation des réseaux des acteur.rices de la prévention, la prévention des RPS) peuvent présenter un intérêt, force est de constater qu’elles restent très peu déclinées et mises en œuvre dans les services déconcentrés.

L’organisation des élections professionnelles du 6 décembre 2018 ne peut servir de prétexte à des orientations ministérielles minimalistes, ni à la réduction des mandats des membres des CHSCT qui sont de 4 ans réglementairement.En matière de prévention des risques professionnels pour 2018, la CGT soumet les propositions suivantes :

  • recentrer les missions de la hiérarchie dans le soutien opérationnel aux agent.es, arrêt du pilotage des services par objectifs quantitatifs ;
  • arrêt des réorganisations des services en l’absence d’une réelle évaluation préalable des risques professionnels réalisée selon les préconisations INRS ou d’organismes de prévention équivalents, et suspension de celles dont l’évaluation conclurait à une dégradation des conditions de travail ;
  • acceptation des recours à un expert agréé demandés par le CHSCTM et les CHSCTR incluant le choix de l’expert par les CHSCT ;
  • renforcement des effectifs des services accueillant du public pour assurer un accueil des publics difficiles, renforcement des effectifs dans les services sous tension ;
  • reconnaissance des accidents de service sans passage en commission de réforme, dans le délai d’un mois, lorsque l’accident a lieu au temps et au lieu du travail (application de l’ordonnance de janvier 2017) ;
  • avance des frais médicaux liés aux AT et MP ;
  • mise en œuvre des préconisations du CHSCTM concernant notamment Ministère Fort, WikiT, réforme territoriale, services emplois, services de renseignements… ;
  • réalisation de l’évaluation des RPS selon la méthodologie élaborée par l’INRS (échange collectif autour des questions de la brochure ED 6140) ;
  • prise en compte dans les fiches de poste des temps d’absence au poste de travail (temps partiel, assistant de prévention, représentant du personnel…) ;
  • arrêt de la mise en concurrence entre agent.es, par le jeu des entretiens professionnels, des primes et des affectations sans passage en CAP ;
  • organisation des groupes d’échanges sur les pratiques professionnelles ;
  • respect de l’ensemble des dispositions relatives au fonctionnement et missions des CHSCT dont l’intervention de l’inspection du travail en cas de DSP ou de DGI ;
  • formation des membres des CHSCTR et CHSCT spéciaux sur la méthodologie d’enquête AT et MP ;
  • engagement de mise en œuvre de CHSCT spéciaux de proximité à l’issue des élections de décembre 2018, en plus des CHSCTR, afin de faciliter l’exercice des missions (analyse des risques professionnels,enquête AT/MP, visite des services…) ;
  • appui à la réalisation des plans de prévention concernant les locaux partagés ;
  • consolidation nationale de tous les éléments relatifs aux risques d’exposition passive à l’amiante bâtimentaire ;
  • respect des obligations concernant le suivi médical des agent.es – suppression de la circulaire de décembre 2017 restreignant les modalités du suivi individuel de l’état de santé des agents.es des ministères sociaux ;
  • consultation du CHSCTM sur les mesures générales prises en vue de faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des accidentés du travail et des travailleurs handicapés, notamment sur l’aménagement des postes de travail ;
  • poursuite des travaux du CHSCTM et des CHSCTR jusqu’à la fin des mandats de 4 ans prévus à l’article 41 du décret 82-453 ;
  • mise en œuvre systématiques des enquêtes paritaires en cas de discrimination et de violences contre les femmes en vertu de l’accord discrimination ;
  • analyse des situations de travail avant acceptation du télétravail afin de vérifier que la demande n’est pas liée à une situation de risques professionnels afin de combattre les risques à la source ;
  • renforcement des moyens humains et du budget du bureau DRH-SD3.

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