Tribune – L’inspection du travail est menacée (L’Humanité du 30 janvier 2015)

Par Anthony Smith, secrétaire général 
de la CGT travail-emploi-formation professionnelle, Luc Raucy, secrétaire du SNUTEFE-FSU, 
 Yves Sinigaglia, secrétaire du syndicat SUD travail-affaires sociales

Avec la loi Macron, le gouvernement va raboter toujours plus les protections dont bénéficient les salariés. Les prérogatives de l’inspection du travail vont ainsi être revues par ordonnance, de même que les sanctions applicables aux employeurs – à commencer par la suppression du délit d’entrave aux représentants du personnel !

L’inspection du travail, chargée d’une mission de service public à travers la mise en œuvre d’un Code du travail encore un peu protecteur des salariés, est aujourd’hui menacée. Les gouvernements successifs n’ont pas cessé leurs efforts pour délégitimer le contrôle des entreprises – au point que les obstacles, outrages et agressions envers des agents de contrôle ont été multipliés par quatre en dix ans !

Pourtant, ce sont 2 300 inspecteurs et contrôleurs du travail qui tentent encore quotidiennement de faire appliquer le droit du travail dans 1,8 million d’entreprises couvrant 18 millions de salariés du secteur privé. Tandis que patron et délinquant sont présentés comme deux notions antinomiques, le droit pénal du travail est piétiné de toutes parts. Les taux de suites judiciaires données aux procès-verbaux relevés par les inspecteurs et contrôleurs du travail sont en chute libre et parallèlement le gouvernement poursuit le démantèlement des droits des travailleurs.

Pourquoi un tel acharnement à affaiblir l’inspection du travail ? Parce qu’elle est, pour le Medef qui trouve ses relais dans la haute hiérarchie du ministère du Travail, une contrainte insupportable (droit d’entrée de jour comme de nuit, contrôle inopiné, pouvoir d’enquête et d’audition, etc.) ; qu’elle a un lien direct avec les travailleurs et leurs syndicats ; qu’elle bénéficie d’une indépendance d’action garantie par une convention internationale ; et qu’elle ne peut en cela être formellement supprimée. Pour en finir avec l’inspection du travail, il leur faut donc la transformer pour la contraindre à devenir un service accompagnant la restructuration des entreprises et œuvrant à leur compétitivité, obéissant à des « priorités nationales » absconses, brisé dans son indépendance d’action – et non plus chargé de répondre aux demandes des travailleurs.

C’est le sens de la réforme de l’inspection du travail que le gouvernement met actuellement en œuvre. Elle attaque encore un peu plus son caractère territorial (un territoire géographique = un agent de contrôle) et généraliste (une compétence sur l’ensemble du Code du travail). Elle se traduit sur le terrain par une suppression d’au moins 10 % des postes de contrôle et le renforcement de l’encadrement intermédiaire. Elle signifie en clair une baisse significative de la capacité d’intervention des agents au service des salariés.

Depuis plusieurs années, les agents de l’inspection et du ministère du Travail se mobilisent sans relâche pour résister à ces attaques. Pour nos missions et parce que les attaques contre l’inspection du travail sont par nature des attaques contre les droits des travailleurs, nous continuerons et appelons à la mobilisation contre la loi régressive de Macron.

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