Déclaration préalable des élu/es CGT-TEFP au CHSCTM du 30 mai 2018

Même si ce n’était pas la même mobilisation (ni le même contexte) qu’il y a 50 ans, le mois de mai aura été revendicatif !

Après l’éternel (du moins l’espère-t-on) 1er mai, il y a eu le 5 mai avec la fête à (et non « de ») Macron, la journée de grève unitaire du 22 mai de la Fonction Publique pour défendre notre statut et exiger le retrait du plan « Action publique 2022 » qui s’annonce dévastateur, et enfin la « marée populaire pour l’égalité, la justice sociale et la solidarité » du 26 mai.

Pourtant, le gouvernement fait mine de ne rien entendre et, pire encore, montre du mépris en déclarant, par la voix du 1er d’entre eux, que « c’était un petit coefficient de marée », en parlant de la dernière mobilisation du 26 mai contre la politique d’Emmanuel Macron.

Cette politique, au sein du Ministère du Travail, et comme il nous l’a été confirmé lors de la rencontre du 26 mars 2018 entre les syndicats et le directeur de cabinet de la Ministre du Travail, se traduit par :

  • La poursuite des baisses d’effectifs alors que les agent.e.s, tous services confondus, croulent sous la charge de travail ;
  • La suppression de missions dans le cadre d’Action Publique 2022 (sans précision sur la nature des missions supprimées) et une absence de recrutements à la hauteur des départs massifs à la retraite qui s’annoncent dans les 5 ans à venir (alors que les services des DI(R)ECCTE proposent aux entreprises des actions en faveur de la GPEC) ;
  • Un mépris total pour les contrôleur/euses du travail, en expliquant qu’il n’était pas envisageable de promouvoir 990 personnes car ce serait « irresponsable pour la qualité du service public » en s’appuyant sur les constats du jury de l’EPIT qui pointent une baisse de niveau des candidat.e.s ;
  • L’absence de réponse sur la faiblesse des ratios de promotions et sur le plan de transformation d’emploi pour les agent.e.s de catégories C.

Ces déclarations sont très mal prises par les agent.e.s dont vous devez assurer la gestion et l’accompagnement en tant que Direction des Ressources Humaines (DRH) des ministères sociaux.

Arrêtez de vous cacher derrière les chef.fes de service en santé sécurité au travail (qui eux-mêmes se retranchent derrière leurs ministères de tutelle dans l’application de politiques sur lesquelles ils n’ont pas la main), et assumez votre part de responsabilité dans la gestion des ressources humaines au sein du Ministère du travail.

La souffrance est réelle et se manifeste sous différentes formes allant de la démotivation et résignation à la tentative de suicide. Ne faites pas comme le gouvernement et la majorité présidentielle, ne sous-estimez pas le mécontentement et le désarroi des agent.e.s.

 

Ecoutez, analysez et, surtout, agissez quand des agent.e.s en viennent à des extrémités comme tenter de mettre fin à leurs jours.

Ainsi, sur ces 2 derniers mois, et comme vous le savez, dans les services déconcentrés des DI(R)ECCTE, nous avons été confrontés à plusieurs situations dramatiques.

Le 2 mai 2018, c’est un agent du l’UD du Tarn (81) qui a tenté de se suicider à deux reprises. Comment ne pas faire le lien avec le rendez-vous, un peu avant, entre le RUD et un chef d’entreprise d’une PME pour essayer de faire que notre collègue n’établisse pas de PV pour des faits de harcèlement moral ?

L’enquête du CHSCTR en cours devra permettre de préconiser les mesures de prévention pour éviter le renouvellement de risques similaires.

Le 24 mars 2018, c’est une agente de l’UD du Pas-de-Calais (62) qui a tenté de mettre fin à ses jours. Quelques jours auparavant, elle avait rédigé un témoignage à l’attention du CHSCT régional sur l’organisation au sein de son service mais qui, à la suite d’une « fuite » de l’administration, lui a été reproché par son chef de service.

Dans le Pas de Calais, comme ailleurs, cela pose la question des mesures qu’il vous faut prendre pour mettre fin à ces comportements inappropriés de la hiérarchie.

Quelques temps auparavant, dans la même région, c’est un membre du CODIR de la DIRECCTE Hauts-de-France qui aurait, selon la direction régionale, été victime d’un « malaise » le 12 mars (il a quand même été dans le coma pendant 3 jours !). Bien que certains éléments tendaient à envisager un lien entre ce « malaise » et ses conditions de travail, la cheffe de service régionale a considéré d’emblée que le lien professionnel n’était pas avéré, que l’« incident » ne s’était pas passé sur le lieu de travail, et qu’il n’y aura donc pas d’enquête du CHSCT, en toute illégalité et contradiction avec les préconisations du guide d’enquête établi par la DRH Ministérielle.

 

Ecoutez également le malaise exprimé par les agent.e.s, comme par exemple dans la fiche de signalement collectif rédigée par nos collègues de l’UD de l’Eure et qui vous a été envoyée dans un mail du 20 avril dernier. En effet, s’il appartient bien au chef de service de prendre les mesures conservatoires immédiates, il apparait que la résolution de la situation décrite dans cette fiche de santé et de sécurité au travail de l’UD 27 nécessite une intervention de la DRH du Ministère concernant l’attribution des effectifs nécessaires au fonctionnement normal des services.

A ce jour, votre seule réponse est de proposer des entretiens téléphoniques avec le médecin coordinateur national, qui ne connait pas l’organisation des services en local, pour faire suite à la demande des agent.e.s de bénéficier d’un examen médical en vue de propositions d’aménagement de leur poste de travail.

 

Ecoutez même les déclarations des chef.fes de service des DI(R)ECCTE (même si elles/ils doivent déjà avoir une oreille plus attentive que quand il s’agit d’une organisation syndicale), comme la Directrice régionale de la DIRECCTE Grand Est qui dénonce « la succession de réformes d’organisation depuis 2008 (fusion des inspections du travail, PMDIT, création des DIRECCTE, réforme « Ministère Fort », réforme territoriale fusionnant les trois DIRECCTE d’Alsace, Champagne Ardennes et Lorraine), le tout dans un contexte de baisse tendancielle des effectifs de 2,4 à 4% par an depuis plusieurs exercices sur le programme 155 de la mission « Travail Emploi ».

Mais force est de constater que ces chef.fes de service manquent cruellement de discernement dans la définition des actions à mettre en œuvre pour répondre au malaise des agent.e.s et à la dégradation de leurs conditions de travail.

Quand la DIRECCTE d’Ile de France expliquait que la suppression de 45 sections d’inspection du travail permettrait de réduire les situations d’intérim et d’améliorer de ce fait la qualité de vie au travail des agent.e.s de contrôle usé.e.s par la récurrence des intérims ; la DIRECCTE Grand Est annonce, quant à elle, dans un document censé être un plan d’action à la suite du rapport de l’ISST dénonçant les défaillances du dialogue social et de la prévention de la santé et de la sécurité dans la région, sa décision d’engager « une réflexion visant à proposer la suppression de ce site » au motif d’une « insuffisance de moyens pour encadrer le site détaché de Reims » avec comme échéance le 2nd semestre 2018… ! Cela est inacceptable pour les agent.e.s et les usager.e.s de nos services d’un site situé dans la plus grande sous-préfecture de France (avec près de 200 000 habitants) et dans un bassin d’emploi de plus de 100 000 salarié.e.s.

Puisqu’on est dans le registre de l’inacceptable, soulignons la situation de double peine infligée à l’un de nos collègues contrôleur du travail de Seine Maritime agressé sur un chantier du bâtiment et à qui l’administration fait subir une demande d’expertise psychiatrique en vue du passage en commission de réforme…. Les mots nous manquent pour qualifier cette politique managériale destructrice !

 

Ecoutez mais aussi respectez les représentant.e.s syndicaux/les et arrêtez la « chasse aux sorcières » actuellement en cours au sein du Ministère du Travail, pourtant labellisé notamment en matière de prévention des discriminations. En effet, depuis l’arrivée de la DRH en chef PENICAUD, les procédures disciplinaires s’enchaînent et s’accélèrent : blâmes contre 4 représentant.e.s syndicaux/les (dont 2 militant.e.s CGT pour avoir participé à une action en défense de salarié.e.s sans papiers), 15 jours de mise à pied avec sursis contre une militante SUD pour avoir répondu à un journaliste au cours d’un rassemblement syndical interprofessionnel au bois de Boulogne près d’un restaurant huppé où se réunissaient des DRH de grandes entreprises et où notre ministre était invitée.

Le 18 avril dernier, ce sont 4 militant.e.s de Seine-et-Marne, CGT et SUD, qui ont été informé.e.s par Joël Blondel de l’ouverture d’une procédure disciplinaire à leur encontre pour avoir « perturbé une réunion de service » en la « transformant en espace de revendications », notamment en « déployant une banderole ».

Des envahissements des réunions, des interpellations de la direction, des banderoles déployées : voilà des moyens d’action classiquement utilisés dans nos services déconcentrés depuis des années sur tout le territoire. En effet, face à l’exercice vain d’expression au sein des instances, les agent.e.s n’ont souvent que ce moyen pour tenter de se faire entendre de leur hiérarchie. Alors pourquoi l’administration se lance-t-elle alors dans une nouvelle procédure à l’encontre de militant.e.s syndicaux/ales ? Tout simplement pour masquer ses propres turpitudes. Car, en réalité certains faits commis durant cette journée du 13 février 2018 sont particulièrement graves : ceux commis par l’administration locale et son directeur. Pourtant, point de sanction à son égard…

 

L’administration est beaucoup moins prompte à agir et réagir, de manière appropriée, pour la prévention des risques auxquels sont exposé.e.s les agent.e.s dans le cadre de leur activité.

Que ce soit sur le risque d’exposition à l’amiante dans les locaux occupés par les agent.e.s des DIRECCTES et DIECCTES et Administrations Centrales.

Suite à une délibération adoptée à la majorité des représentant.e.s du personnel du CHSCT-M Travail demandant le recours à un expert agréé au titre du risque grave lié à l’amiante bâtimentaire, vos services ont renvoyé (encore une fois) aux chef.fes de service des DI(R)ECCTE la responsabilité de réclamer les DTA, et se sont contentés d’engager une démarche auprès de la Direction Immobilière de l’Etat pour avoir des infos sur les bâtiments, et dont nous attendons le retour.

Les exemples liés aux problèmes liés à la présence d’amiante dans des locaux occupés par des agents que vous êtes censé accompagner et qui ont été portés à votre connaissance ne manquent pourtant pas : Cité administrative de Rouen, Tour Bretagne, l’UD de Saint Brieuc (22),…

Laisser la gestion du risque amiante à la seule main des DIRECCTE, c’est de fait renoncer à une politique de prévention nationale cohérente, c’est accepter que le seul critère sérieux pris en compte n’est pas le risque d’inhaler la fibre tueuse mais les contraintes budgétaires propres de chaque région. Alors que nos collègues de Saint Brieuc viennent d’être informé.e.s que les joints de fenêtres amiantés et dégradés vont être recouverts et les bureaux nettoyés avant leur réintégration, nos collègues de Rouen confronté.e.s aux mêmes joints amiantés dégradés ont l’obligation de rester dans leurs bureaux avec interdiction d’ouvrir leur fenêtre depuis plus de 3 mois maintenant ! A croire que l’amiante bretonne est moins dangereuse que celle de Normandie !

 

Que ce soit encore sur les risques liés aux troubles musculo-squelettiques, sur les risques psychosociaux ou sur les risques multiples qui ont émergé et/ou se sont amplifiés à l’occasion de la mise en œuvre de la réforme territoriale de l’Etat – qui sont aujourd’hui examinés et discutés parce que nous avons demandé avec les syndicats SUD et SNUTEFE, l’organisation d’une réunion extraordinaire du CHSCTM.

Les mesures de prévention présentées aujourd’hui sont pour le moins très insuffisantes.

Ainsi, pour ne prendre qu’un exemple, les recommandations émanant du rapport sur l’impact de la réforme territoriale sur les conditions de travail des agents des DIRECCTE n’ont pratiquement pas été suivies d’effet.

Que ce soit enfin sur la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, pour laquelle le projet d’instruction soumis ce jour pour information, s’avère être beaucoup plus restrictif et limitatif que la circulaire DGAFP du 9 mars 2018 relative à la même problématique.

L’ensemble de ces constats relatifs aux risques professionnels dans nos services et aux situations réelles de travail devraient logiquement aboutir à renforcer les moyens réels d’intervention des CHSCT existants en vue de la mise en œuvre de véritables mesures de prévention. C’est malheureusement tout le contraire que souhaite la DRH en proposant, à l’issue des prochaines élections, de systématiser la création de commissions locales de sécurité, commissions qui n’ont aucune existence légale, et par conséquent aucune prérogative propre, en ne laissant qu’un seul CHSCT réglementaire par grandes régions (sauf IDF). C’est l’exact contraire de la circulaire Fonction Publique de 2015 qui insiste sur la nécessité de « CHSCT de proximité » de plein exercice au plus près des agent.e.s, ce que nous continuons à revendiquer.

Comment ne pas faire le lien entre cette proposition scandaleuse et les annonces gouvernementales de la suppression à venir des CHSCT dans la Fonction Publique dans la droite ligne des ordonnances anti sociales de Macron.

 

En résumé, afin de prouver, comme vous l’écrivez vous-même dans votre instruction relative à l’organisation de la santé et à la sécurité au travail au sein des services déconcentrés, que « les ministères sociaux sont très attachés à faire progresser leur politique de protection de la santé et de la sécurité de leurs agent.e.s. », prenez vos responsabilités et agissez dans l’intérêt des agent.e.s et dans l’amélioration concrète et réelle de leurs conditions de travail.

 

Déclaration CGT CHSCT-M du 30 mai 2018