Retrait de la loi El Khomri : au ministère du travail et de l’emploi, mobilisons-nous (déclaration CGT-SUD-SNU-FO)

Le 9 mars 2016, c’est le début de la mobilisation dans la rue : des rassemblements sont organisés partout en France, nous appelons à y participer. Des préavis de grève ont été déposés au ministère du travail et dans la fonction publique.

Nous appelons d’ores et déjà à participer à la journée d’action et de grève interprofessionnelle du 31 mars 2016.

Sans attendre nous appelons l’ensemble des collègues dans tous les services, à se réunir, à discuter et à s’emparer de toutes les initiatives de mobilisation jusqu’au retrait du projet.


Le projet de loi « visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs », transmis au Conseil d’Etat le 18 février, montre pour ceux et celles qui en doutaient encore que le gouvernement est résolu à satisfaire jusqu’au bout les demandes du patronat.

En quatre ans, le gouvernement aura adopté pas moins de 4 lois réformant le code du travail (loi de juin 2013, loi sur la formation professionnelle de janvier 2014, lois Macron et Rebsamen d’août 2015) – sans compter le décret de mars 2014 organisant l’inspection du travail sur un nouveau modèle dont les premiers résultats sont catastrophiques pour les usagers mais aussi pour les agents, sans oublier le décret d’avril 2015 supprimant l’autorisation administrative d’affectation de jeunes travailleurs à des travaux dangereux.

Tous ces projets visent à alléger les obligations des entreprises et à diminuer les protections dont bénéficient les salarié-e-s et leurs représentants, ainsi que les moyens mis à leur disposition pour se défendre.

Mais la loi El Khomri, suivant les préconisations du rapport Combrexelle, affiche une ambition plus importante. Le ton est donné dès l’article premier, qui subordonne les droits et libertés des salarié-e-s au « bon fonctionnement de l’entreprise ».  Avant de lancer la réécriture du code du travail selon une « nouvelle architecture » qui vise à inverser la hiérarchie des normes et à liquider le principe de faveur, avec la primauté donnée à l’accord d’entreprise, même (et surtout !) s’il est moins favorable pour les salarié-e-s que les dispositions légales ou de branche. Comme à l’habitude, c’est la réglementation du temps de travail, déjà truffée de dérogations, qui sert de terrain d’expérimentation en attendant la révision totale prévue d’ici 2018.

Les arguments des rares défenseurs du projet, selon lesquels cette « nouvelle architecture » vise à développer le dialogue social et la négociation, ne résistent pas à un minimum d’analyse. D’abord parce que la négociation d’entreprise peut difficilement être porteuse de progrès social dans un pays frappé par le chômage de masse. Ensuite et surtout, parce que le gouvernement donne aux employeurs les moyens de contourner la négociation qu’il n’a de cesse de célébrer, en créant un référendum pour permettre l’adoption « d’accords » minoritaires et contourner les syndicats majoritaire, en permettant l’aménagement unilatéral du temps de travail sur quatre mois ou l’institution de forfaits jours non prévus par leur convention collective. Le but n’est donc que de rendre le travail encore plus flexible et les salarié-e-s encore plus dociles.

A cette « nouvelle architecture », le gouvernement a cru bon d’ajouter des mesures particulièrement dures et cyniques pour les salarié-e-s. Ainsi de la nouvelle tentative, après la censure par le Conseil Constitutionnel de dispositions de la loi Macron en ce sens, de plafonner les indemnités accordées par le conseil des prud’hommes en cas de licenciement abusif, soi-disant pour ne pas décourager l’embauche. Quant à la nouvelle définition du licenciement économique, elle est directement inspirée des réformes adoptées en Espagne au plus fort de la crise. Là encore la mesure est sous-tendue par un raisonnement absurde : faciliter les licenciements facilite juste les licenciements, pas les embauches. Ou alors le chômage aurait disparu depuis longtemps ! Cela nous laisse entrevoir l’avenir que dessine le MEDEF pour les salarié-e-s de France, le même que celui des travailleurs grecs, portugais ou espagnols : explosion des contrats précaires et des faux indépendants, salaires de misère, licenciements sans possibilité de contestation.

Enfin, ce projet sape les possibilités de contrôle des entreprises en matière de droit du travail et prive l’inspection du travail d’une part importante de ses moyens d’action. C’est un bouleversement de l’inspection du travail telle que nous la connaissons. Outre le fait qu’il sera difficile voire impossible de renseigner les salarié-e-s et de vérifier la bonne application de leurs droits sans disposer des accords en vigueur dans chaque entreprise, les dispositions fixées par ces accords ne feront l’objet d’aucune sanction pénale : le gouvernement organise sciemment l’impossibilité du contrôle et l’impunité pour les patrons.

Le rejet de la loi Travail est massif et commence à s’exprimer dans la rue. Nos organisations syndicales estiment qu’il est possible aujourd’hui de faire reculer le gouvernement. Parce que la régression sociale est au cœur même du texte : ce projet n’est ni amendable, ni négociable et doit être retiré.

L’abaissement des garanties collectives dans le secteur privé, outre ses conséquences désastreuses pour les personnes directement concernées, serait aussi un nouvel élément confortant les attaques contre le statut général de la fonction publique et en justifiant de nouvelles.

Mobilisés avec les salarié-e-s du privé comme du public et avec la jeunesse, une victoire est possible si ensemble nous faisons front pour informer, débattre, mobiliser, manifester, afin de mettre en échec les projets régressifs et fortifier les droits des salarié-e-s et des demandeurs d’emploi. L’époque dans laquelle nous vivons rend nécessaire encore davantage de code du travail, d’inspection du travail, et la création d’un vrai service public de l’emploi.

 Le 4 mars 2016

Lire et télécharger la déclaration intersyndiale