Harcèlement sexuel, comportements sexistes et homophobes : dans la fonction publique aussi ça existe et ça se combat !

Une enquête sur le harcèlement au travail réalisée en mars 2014 révélait que 20% des femmes actives ont dû faire face, un jour ou l’autre de leur vie professionnelle, à une situation de harcèlement sexuel.

Les gestes et propos à connotation sexuelle sans le consentement de la personne, l’environnement de travail tolérant des blagues à caractère sexuel et le chantage sexuel sont, avec l’envoi de message à caractère pornographique, les manifestations les plus rapportées. Les auteurs les plus identifiés sont des collègues, puis l’employeur ou le supérieur hiérarchique.

Près de 30 % des victimes de ces faits de harcèlement n’en parlent à personne. Dans 5% des cas seulement, ces faits ont fait l’objet d’une plainte.

Ces atteintes à la dignité, à l’intégrité physique et mentale des femmes compromettent le droit au travail des femmes. Il faut les combattre ! Toujours et encore !

Le harcèlement sexuel et les comportements homophobes, c’est interdit !

La loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel, a modifié, en plus du code du travail et du code pénal, le statut de la fonction publique. Les dispositions de cette loi s’appliquent donc dans nos services, aux agentEs fonctionnaires et non-titulaires.

Elles visent à les protéger contre tout agissement de harcèlement sexuel ou assimilé à du harcèlement sexuel (article 6 ter du titre I du statut général). Elles les protègent également contre toute forme de discrimination résultant du fait d’avoir subi ou refusé de subir de tels agissements, les avoir relaté ou d’avoir engagé des actions (recours administratif ou poursuites pénales) visant à les faire cesser.

Les actes interdits sont aussi bien les agissements sexistes que les comportements homophobes ou dirigés contre des personnes transsexuelles ou transgenres. La notion d’identité sexuelle a en effet été introduite à l’article 6 du titre I du statut général.

Ces dispositions viennent également renforcer l’obligation faite aux directeurs régionaux et aux responsables d’unité territoriale de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité.

La circulaire de la Direction générale de l’Administration et de la Fonction publique du 4 mars 2014 relative à la lutte contre le harcèlement dans la fonction publique précise les agissements punissables et les obligations de l’Administration.

Les agissements qui tombent sous le coup de la loi

La loi prévoit qmetro2ue le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui :

  • soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant ;
  • soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

Par ailleurs, est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave, dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

Une circulaire du 7 août 2012 signée par la ministre de la justice a précisé les orientations générales de politique pénale en la matière. Pour les faits de harcèlement sexuel, il ressort que :

  • la loi n’exige pas que la victime ait fait connaître de façon expresse et explicite à l’auteur des faits qu’elle n’était pas consentante. Le juge peut ainsi retenir une situation objective d’absence de consentement (par exemple un silence permanent face aux agissements, ou une demande d’intervention adressée à des collègues ou à un supérieur hiérarchique). Dit autrement, l’absence de réprobation sur des actes de harcèlement sexuel ou assimilés (particulièrement difficile si ceux-ci émanent d’un supérieur) ne saurait être interprétée comme une forme implicite de consentement ;
  • la condition de répétition des actes, nécessaire à la qualification du harcèlement sexuel, exige simplement que les faits aient été commis à deux reprises au moins. Aucun délai minimum n’est requis entre les actes commis ; aucune durée non plus, les actes pouvant être répétés dans un très court laps de temps ;
  • il suffit que les comportements revêtent une connotation sexuelle, ce qui n’exige pas qu’ils présentent un caractère explicitement et directement sexuel. Cette notion pourrait donc être étendue à toute forme d’intrusion dans l’intimité ;

S’agissant des deux types de conséquence que les faits peuvent avoir, la circulaire précise :

  • concernant « l’atteinte à la dignité de la victime », celle-ci recouvre les propos ou comportements ouvertement sexistes, grivois, obscènes (paroles ou écrits répétés constituant des provocations, injures ou diffamations, même non publiques, commises en raison du sexe ou de l’orientation ou de l’identité sexuelle de la victime) ;
  • concernant « la situation intimidante, hostile ou offensante générée par les actes de harcèlement», cela correspond aux comportements qui ont pour conséquence de rendre insupportables les conditions de travail de la victime.

Quant aux faits assimilés au harcèlement sexuel, il suffit d’un acte unique (donc sans répétition) présentant une « particulière gravité ». Cette « particulière gravité » s’apprécie au regard de la gravité des pressions exercées (au vu des relations existant entre le harceleur et sa victime notamment) et de leur finalité (obtenir un acte de nature sexuelle). Il s’agit notamment des faits de chantage sexuel.

La circulaire rappelle que la loi prévoit des circonstances aggravantes pour toute personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions, ou qui connaît la vulnérabilité de la victime.

L’AVFT (AsLes femmes ne sont pas des objetssociation européenne contre les violences faites aux femmes au travail) estime cependant qu’il faut aller plus loin. Pour elle, « l’interprétation des termes de la loi doit être débarrassée des préjugés qui entourent la notion de « séduction ». Des commentaires incessants sur l’apparence physique, sur la manière de se vêtir, l’envoi de mails à caractère érotique ou pornographique, insister pour qu’une collègue finisse par « accepter » une invitation à dîner sont, dans le cadre du travail et lorsqu’ils visent une femme, la manifestation de codes sociaux sexistes. Ils consistent à l’évaluer en fonction de son apparence physique, de son degré de tolérance à des environnements « sexistes », et non en fonction de son travail, ce qui est en soi « dégradant, humiliant ou offensant »».

Les comportements qui ont déjà été sanctionnés

Les faits suivants ont été condamnés :

  • contacts physiques destinés à assouvir un fantasme d’ordre sexuel, voire à accentuer ou provoquer le désir sexuel (regards, exhibition, pornographie, frôlements, attouchements, baisers) ;
  • remarques verbales répétées (invitations, avances, promesses, propos obscènes, questions ou confidences sur la vie sexuelle de la victime ou de l’agresseur, propositions sexuelles) ;
  • propos déplacés d’un collègue ou d’un supérieur, y compris en dehors du temps et des lieux de travail (par exemple à l’occasion de soirées organisées après le travail) ;
  • recherche de façon répétée et régulière d’une promiscuité avec la victime, ou pression quasi quotidienne, contre son gré ;
  • tentatives multiples de séduction ou d’obtenir des faveurs de nature sexuelle par la multiplication de cadeaux et d’appels, de visites au domicile ou par l’intrusion dans la vie privée, dans le but de convaincre et contraindre à céder à des avances ;
  • envoi de courriers électroniques anonymes dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles ;
  • tenter d’embrasser une personne à plusieurs reprises, se livrer à des gestes impudiques, tenir des propos à connotation sexuelle, la dénigrer en public (même en l’absence de demande directe d’accorder des faveurs sexuelles) ;
  • demander de faire « des massages de nature sexuelle » ;
  • suppression d’une prime et affectation à un poste pénible et inadapté après refus de propositions de nature sexuelle, bénéfice d’une promotion en cas d’acceptation d’une relation sexuelle, sanction en cas de refus d’avances ;
  • comportement grossier à l’égard de salariées, avec propositions d’ordre sexuel faites à l’une d’elles en échange d’avantages professionnels.

Enfin, l’excuse de la « plaisanterie », invoquée habituellement par les prévenus, n’est pas retenue dès lors que les victimes n’ont pas ressenti les faits comme des plaisanteries douteuses mais bien comme des agressions et que certains témoins des faits ont eu le sentiment que les limites de la plaisanterie étaient largement dépassées.

Les obligations de l’administration

L’obligation de prévention

La prévention du harcèlement sexuel s’articule avec la démarche globale de prévention des risques auxquels sont exposés les agentEs.

L’administration est en effet tenue de mettre en œuvre les principes généraux de prévention définis à l’article L.4121-2 du code du travail, qui impose de « planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales, et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L.1125-1 et L.1153-1 ». Le CHSCT doit être pleinement associé à cette démarche de prévention.

Le harcèlement sexuel ouvre droit à a protection fonctionnelle

Lorsque l’administration est informée précisément par l’agentE de faits qui vont se produire ou qui n’ont pas pris fin, elle doit mettre en œuvre les moyens les plus appropriés pour éviter ou faire cesser les attaques auxquelles la-le fonctionnaire est exposéE. Dans la pratique, pour les cas où l’administration est en mesure d’établir la responsabilité de l’auteur du harcèlement, l’octroi de la protection fonctionnelle peut se traduire par des mesures de changement d’affectation, d’éloignement ou de suspension des fonctions.

L’administration a dans ce cadre, une obligation d’assistance juridique de l’agentE dans les procédures judiciaires entreprises, notamment devant les juridictions pénales.

Enfin, la mise en œuvre de la protection accordée à l’agentE par l’administration, lui ouvre le droit d’obtenir directement auprès d’elle le paiement de sommes couvrant la réparation du préjudice subi du fait des attaques, avant même que l’agentE ait engagé une action contentieuse contre l’auteur de l’attaque (CE, 18 mars 1994, Rimasson, n° 92410).

La suspension

La mesure de suspension des fonctions est une mesure préventive que l’administration peut mettre en œuvre en cas de faute grave ou de présomption de faute grave. Il s’agit souvent d’une mesure d’éloignement du service, dictée par l’urgence, destinée à mettre fin au trouble que pourrait créer, au sein du service, la présence du fonctionnaire en cause.

Les sanctions disciplinaires

Outre les sanctions civiles ou pénales, des sanctions résultant de poursuites disciplinaires peuvent être prononcées contre un agent ayant commis des actes de harcèlement sexuel ou moral. Toute personne ayant procédé ou enjoint de procéder à des faits de harcèlement sexuel ou à des agissements de harcèlement moral est donc passible d’une sanction disciplinaire. Les procédures disciplinaires, civiles et pénales sont indépendantes les unes des autres.

poings Pour le SNTEFP-CGT c’est un enjeu de lutte

Sur le lieu de travail, la lutte contre le harcèlement sexuel n’est pas une question anodine, ni seulement juridique, mais bien un enjeu de lutte. C’est une affaire syndicale et de mobilisation : personne ne doit se sentir isolée, sans défense collective… ce sont les harceleurs qui doivent se sentir en danger !

Notre syndicat a déjà eu à connaître dans nos services des situations ou des comportements sexistes ou qui pourraient aujourd’hui motiver des recours ou des actions en justice.

Nous refusons que le harcèlement sexuel soit un tabou dans nos services, tant ces actes se nourrissent à la fois du manque d’information, du silence et de l’isolement des victimes, mais également du sexisme et de l’homophobie produits par la société elle-même.

Notre syndicat demande dans nos services :

  • l’ouverture d’enquêtes lorsque de tels faits sont relatés, soit directement par les agentEs, soit par les organisations syndicales ou le CHSCT ;
  • la mise en place effective de mesures de protection et de soutien pour les collègues qui relatent ou dénoncent des faits de harcèlement sexuel ;
  • l’effectivité de la protection fonctionnelle dans les cas de harcèlement sexuel ;
  • une politique de prévention à soumettre aux CHSCT.

Nous appelons les agentEs à réagir si elles ou s’ils sont témoins ou victimes de tels agissements.

Les agentEs qui seraient concernéEs peuvent contacter nos militantEs :
commission-femmes@cgt-tefp.fr

et/ou l’AVFT : permanences téléphoniques au 01.45.84.24.24 – lun au vend, 9h30 à 15h00 / www.avft.org.

Voir aussi notre rubrique documentée droit des agents / droits des femmes sur notre site www.cgt-tefp.fr

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