Maladie : quelle incidence sur les congés, les JRTT, les primes, le remboursement domicile-travail ?

Acquisition des congés annuels : pas d’incidence

Le congé annuel prévu par l’article 1 du décret n°84-972 du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l’Etat est accordé pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre.

Les congés pour raison de santé (CMO, CLM, CLD, congé de grave maladie…) sont considérés, pour l’application de ces dispositions, comme service accompli.

Congés annuels non pris du fait d’une absence pour maladie : report automatique dans la limite de quatre semaines (en principe sur quinze mois)

L’article 5 du décret n°84-972 du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l’Etat dispose que le  congé dû pour une année de service ne peut se reporter sur l’année suivante, sauf autorisation exceptionnelle ; et que le congé non pris à l’issue de la période de référence (31 décembre) ou de la période de report est perdu et ne donne lieu à aucune indemnité compensatrice.

Cependant, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé, en 2009, qu’une règle nationale ne pouvait priver un salarié ou un·e agent·e public·que du droit au congé annuel lorsqu’il a été en congé de maladie durant tout ou partie de la période de référence et qu’il n’a pu exercer son droit à congé l’expiration de cette période (CJUE, 20 janvier 2009, affaires C-350/06 et C-520/006). Cela serait contraire à l’article 7 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail obligeant les états-membres à prévoir un congé annuel.

Tirant les conclusions de cette jurisprudence, la circulaire BCRF1104906C du 22 mars 2011 relative à l’incidence des congés de maladie sur le report des congés annuels invite les chefs de service à accorder automatiquement à l’agent·e le report du congé annuel restant dû au titre de l’année écoulée si iel n’a pas pu le prendre au terme de la période de référence. Le report concerne tous les congés statutaires pour maladie :

  • congé de maladie ordinaire ;
  • congé pour accident de service ou maladie d’origine professionnelle ;
  • congé de longue maladie ;
  • congé de longue durée ;
  • ainsi que pour le congé de grave maladie des agents non titulaires.

En 2012, le Conseil d’Etat a confirmé cette position en censurant les stipulations d’une circulaire du 10 décembre 2010 sur les règles de vie quotidienne dans les services déconcentrés de la direction générale des finances publiques au motif notamment qu’elle ne prévoyait pas le report des congés annuels des agents qui n’auraient pu les prendre dans l’année de référence au motif d’un congé maladie (CE, 26 octobre 2012, n°346648).

Cette position a été précisée en 2017 par le Conseil d’Etat : le droit au report s’exerce dans la limite de quatre semaines (CE, 26 avril 2017, n°406009).

Vous n’avez pas à faire de demande expresse de report de vos congés annuels, il revient aux services des ressources humaines de les reporter automatiquement. Soyez vigilant/e !

La prise des congés annuels reportés est soumise, comme toute prise de congés annuels, à l’accord de l’administration.

Attention : rien n’est dit concernant la période pendant laquelle le congé peut être reporté. L’arrêt du Conseil d’Etat du 26 octobre 2012 n’évoque qu’une règle de report mais ne précise pas de période de report bien spécifique. Le juge européen a quant à lui précisé qu’une réglementation nationale pouvait imposer une limite temporelle : si la période de report doit dépasser substantiellement la durée de la période de référence pour laquelle elle est accordée afin de permettre à l’agent de bénéficier de son droit au congé annuel pour se reposer et disposer d’une période de détente, eu égard à la finalité du congé  annuel, elle doit également éviter une durée d’absence trop importante (voir ce communiqué de la Cour de justice de l’Union européenne du 22 novembre 2011). Une période de report de quinze mois a été jugée suffisante et une période de neuf mois insuffisante (CJUE, affaire C-214/10, 21 novembre 2011 ; CJUE, affaire C-337/10, 3 mai 2012). L’avis du Conseil d’Etat du 26 avril 2017 se réfère à cette jurisprudence pour énoncer qu’en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires fixant une période de report des congés annuels, un·e juge pouvait considérer qu’ils pouvaient être pris au cours d’une période de quinze mois après le terme de l’année civile de référence.

L’avis de la CGT-TEFP : aucune réglementation n’imposant de période de report, demandez le report sans limitation de durée !

CJUE, 20 janvier 2009, affaires C-350/06 et C-520/006

CJUE, 21 novembre 2011, affaire C-214/10

CJUE, 3 mai 2012, affaire C-337/10

Loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat (article 34)

Décret n°84-972 du 26 octobre 1984 relatif aux congés annuels des fonctionnaires de l’Etat

CE, 26 octobre 2012, n°346648

CE, 26 avril 2017, n°406009

JRTT : réduction par tranche de 12 jours d’absence pour raisons de santé

L’article 115 de la loi n°2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 prévoir que les périodes de congé pour raison de santé ne peut générer de temps de repos lié au dépassement de durée annuelle du travail.

Par conséquence, le droit à jours RTT est réduit en cas d’absence pour raisons de santé (CMO, CLM, CLD, congé grave maladie des non-titulaires…). Le quotient de réduction est calculé selon la durée hebdomadaire de travail.

Pour une durée du travail hebdomadaire de 38h30, la réduction intervient après 12 jours d’absence : vous perdez 1 JRTT par tranche de 12 jours consécutifs ou non (1 jour pour 12 jours, 2 jours pour 24 jours… la circulaire ne prévoit pas de possibilité de diviser la tranche et de déduire 0,5 jour pour 6 jours). La semaine dite d’hiver, qui est une semaine de RTT, est intégrée dans le calcul.

Le décompte se fait en fin d’année en cumulant toutes les absences pour raisons de santé de l’année, consécutifs ou non (cela ne concerne pas les absences maternité). La déduction est faite sur les jours de l’année suivante si le nombre de JRTT à déduire est inférieur au nombre de jours à déduire.

Lettre DAGEMO du 3 février 2012 accompagnant la circulaire n°NOR MFPF1202031C du 18 janvier 2012 relative aux modalités de mise en œuvre de l’article 115 de la loi n°2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011

Primes

Les primes et indemnités versées aux fonctionnaires liées à l’activité ou aux fonctions (part IFSE du RIFSEEP) sont :

  • maintenues dans les mêmes proportions que le traitement en cas de congé maladie ordinaire (100% pendant les trois premiers mois puis 50% pendant les neuf mois suivants) et de congé pour accident de service ou maladie d’origine professionnelle (100% pendant toute la durée du congé) ;
  • suspendues pendant le congé longue maladie (CLM) et le congé longue durée (CLD).

Pendant ces congés, les fonctionnaires ne peuvent acquérir de nouveaux droits au titre des primes et indemnités non forfaitaires qui ont le caractère de remboursement de frais et au titre des primes non forfaitaires qui sont liées à l’organisation et au dépassement du cycle de travail.

Les primes modulées en fonction de la manière de servir et/ou des résultats obtenus (part CIA du RIFSEEP) ont vocation à être réajustée, après chaque évaluation annuelle. Même si vous avez été en maladie, elle peut donc vous verser un CIA conforme à l’appréciation de votre manière de servir sans prorata, comme elle peut ajuster à la baisse si vous elle estime que vos résultats ne sont pas bons. Si vous avez été absent toute l’année, en revanche, elle ne vous versera rien.

A noter : si vous avez été placé en CLM ou CLD de manière rétroactive à la suite d’une demande présentée au cours d’un CMO ou d’un congé pour accident de service ou maladie d’origine professionnelle, les primes et indemnités versées durant ce congé jusqu’à la date de la décision d’admission en CLM ou CLD demeurent acquises.

Décret n°2010-997 du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l’État dans certaines situations de congés

Circulaire n°BCRF1031314C du 22 mars 2011 relative à l’application du décret n°2010-997 du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l’Etat et des magistrats de l’ordre judiciaire dans certaines situations de congés

Remboursement de l’abonnement de transport domicile-travail : suspension

La prise en charge partielle du prix des titres d’abonnement pour le trajet domicile-travail est suspendue pendant les périodes de congé de maladie (CMO), de congé de longue maladie (CLM), de congé de grave maladie, de congé de longue durée (CLD). La prise en charge est maintenue jusqu’à la fin du mois au cours duquel débute le congé. Lorsque la reprise du service a lieu au cours d’un mois ultérieur, la prise en charge est effectuée pour ce mois entier.

Décret n°2010-997 du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l’État dans certaines situations de congés (article 2)

Décret n°2010-676 du 21 juin 2010 instituant une prise en charge partielle du prix des titres d’abonnement correspondant aux déplacements effectués par les agents publics entre leur résidence habituelle et leur lieu de travail (article 6)

Circulaire n°BCRF1031314C du 22 mars 2011 relative à l’application du décret n°2010-997 du 26 août 2010 relatif au régime de maintien des primes et indemnités des agents publics de l’Etat et des magistrats de l’ordre judiciaire dans certaines situations de congés