Revue des missions : Une énième restructuration au Ministère du Travail et de l’Emploi

Lors du CTM des 24 et 25 mars 2022, DGT et DGEFP ont présenté les conclusions d’une revue des missions qui impactera essentiellement les sections centrales travail et les services de l’emploi.

Pourquoi une nouvelle revue des missions ?

Initiée en 2017, cette revue des missions est remise au goût du jour avec l’arrivée du PSATE dans nos services : « le projet stratégique pour l’administration territoriale de l’Etat ». Après la LOLF, la RGPP, la MAP, le REATE, l’OTE, voilà donc  un nouvel acronyme qui vient s’ajouter à moult réformes successives dont le seul objectif, année après année, est la destruction  du service public. Ces réformes ont ainsi conduit au fur et à mesure à une compression des moyens d’action et des effectifs de l’Etat et par conséquent à réduire  la qualité du service rendu à la population et aux travailleur.ses.

La logique est toujours la même : on réduit les effectifs pour ensuite supprimer les missions (dans le verbiage technocratique, on dit « recentrer les effectifs sur les missions stratégiques » ou encore « rationaliser les modalités d’intervention des services dans un contexte difficile d’adéquation des missions avec les moyens »).

En effet, et comme nous l’apprend le  rapport social unique de 2020, on constate  une chute vertigineuse des effectifs depuis 2017 avec un plafond d’emplois amputé de 920 postes entre 2017 et 2020. Les services déconcentrés en payent d’ailleurs un lourd tribut par l’accroissement des effectifs en administration centrale, ce qui fait que les services déconcentrés ont perdu 945 emplois sur la période.

Que propose le Ministère face à cette situation ? Non pas de recruter des agent.es pour exercer les missions, mais de les confier à des opérateurs privés ou tout bonnement les supprimer.

Enfin le PSATE entend donner la main aux Préfèt.es de Région sur « une enveloppe de 3% des fonctionnaires » affectés dans les services déconcentrés. Autrement dit, les Préfet.es  moduleront « les moyens notifiés dans chaque département » à leur guise, au grès de leurs lubies, sans considération pour les collègues et le service public !

Recul de l’Etat, privatisation et abandon de missions : voilà ce qu’il y a derrière cette revue des missions

Présentée  comme une manière de supprimer des missions exercées en doublon afin de redonner des capacités d’action aux services, cette revue des missions constitue en réalité un nouveau recul de l’Etat dans sa mission de contrôle et prévoie de nouveaux transferts de compétences vers des opérateurs privés.

C’est par exemple le cas lorsque le Ministère entend  transférer l’agrément des sociétés coopératives et participatives à la confédération générale des SCOP qui n’est autre que l’association représentant le patronat… des SCOP. Jusqu’ici, cette association rendait un avis sur la possibilité pour une SCOP de recevoir son agrément, mais le contrôle de la validité d’une demande d’agrément relevait du ministère du travail. Ce n’est pas neutre lorsque l’on sait que ces dernières bénéficient d’exonération sur les bénéfices réalisés lorsqu’ils sont distribués aux salarié.es. Dès lors que la délivrance de cet agrément est confiée à un opérateur privé, toutes les dérives sont possibles. Mais que l’on se rassure, pour la DGT, il n’y a aucun problème puisque le contrôle pourra être exercé à postériori, le ministère étant toujours en charge de publier l’arrêté relatif à l’agrément des SCOP. On se demande bien qui se chargera d’un tel contrôle dès lors qu’il n’y a plus d’agent.es pour occuper la mission ?

La suppression de l’analyse au fond par les services  du Ministère du Travail des accords d’épargne salariale, pour la confier à l’URSSAF,  finit de parachever ce qui est conduit depuis de nombreuses années concernant le dépôt des accords d’entreprise : la validité de ces derniers  ne fait plus l’objet d’un contrôle préalable lors du dépôt. La conséquence est double : pour les salarié.es,  c’est le risque accru de l’entrée en vigueur d’accords illégaux dans les entreprises et pour les collègues une perte de sens du métier partagée par tou.tes celleux qui exercent la mission.

Il est également prévu de transférer à l’agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) une partie des missions exercées au titre de la politique du titre et l’habilitation des jurys. Plus précisément, les actes de gestion en matière de politique du titre : édition et envoi des parchemins, des livrets de certification et des certificats complémentaires de spécialisation et des notifications de résultats aux candidat.es en échec, instruction des demandes d’habilitation des membres de jury des titres professionnels, traitement des décisions de recevabilité VAE et traitement des décisions d’équivalence seront désormais confiés à l’AFPA. La DGEFP tente de  nous rassurer en précisant d’une part que les agent.es concerné.es ne suivront pas les missions transférées et d’autre part, que l’AFPA est un EPIC qui exercera ces nouvelles missions dans le cadre d’une délégation de service public.

Lorsque les missions ne sont pas transférées, elles sont tout simplement supprimées : il est ainsi question de substituer la procédure d’enregistrement des Intervenant.es en prévention des risques professionnels qui fait l’objet d’un contrôle par les services (sur les diplômes détenus et donc les compétences pour assurer la fonction) par une simple procédure déclarative. On se dirige donc tout droit vers une inflation d’individus ou sociétés qui s’auto-déclareront intervenant.es sur le champ de la santé et la sécurité au travail sans que l’on se soit assuré au préalable qu’iels disposent des compétences pour le faire.

Des gains attendus par la numérisation : mais de qui se moque-t-on ?

Autre point de cette revue des missions : la numérisation censée nous faire « gagner en efficacité par des mesures de modernisation et de rationalisation, en réponse à des irritants ». Les usagèr.es du service sont-iels ces irritant.es qu’il faudrait corriger pour nous faire gagner en efficacité?

Qu’à cela ne tienne, le Ministère nous fait rentrer dans l’ère du tout numérique, peu importe la fracture numérique, peu importe que près de 6 millions d’habitant.es en France n’aient toujours pas accès à internet. Au menu : dématérialisation  des contrats d’apprentissage du secteur public, de la déclaration d’activité des organismes de formation, de l’homologation des ruptures conventionnelles, de la liste des défenseur.ses syndicaux, de la transmission du rapport annuel d’activité des conseiller.es du salarié.e, des rapports des services de santé au travail…

Enfin, on doute sérieusement de la capacité de notre administration à mettre en place des outils informatiques et numériques ergonomiques, fiables  et simples d’utilisation tant les dernières expériences se sont révélées de cuisants échecs (WIKIT, SVE,…) et alors que le déploiement de NOEMIE pourrit toujours la vie des collègues concerné.es, sans solution pour l’heure.

Et les agent.es dans tout ça ?

D’abord, cette revue des missions s’est faîte évidemment sans les agent.es,  DGT et DGEFP indiquant qu’elle est le résultat de nombreuses discussions avec les directeur.ices ; ces dernièr.es ayant une connaissance fine de la réalité concrète du travail ! (sic).

Ensuite, cette revue des missions est menée sans étude d’impact dans les services et pour les collègues : quels effectifs concernés ? Quel redéploiement pour les collègues qui occupent actuellement les missions ? Quel accompagnement ? Quelle évaluation des risques professionnels liés à ces restructurations ? Ces collègues vont-iels se retrouver sur lettre de mission comme on peut le déplorer encore aujourd’hui suite à la mise en œuvre de l’OTE ? ou bien viendront iels constituer l’enveloppe de 3% d’agent.es à la main des préfèt.es ? Autant de questions que le dernier CTM n’a pas permis de lever.

POUR LA CGT, CETTE REVUE DES MISSIONS DOIT ETRE ABANDONNEE !

NOUS EXIGEONS LE MAINTIEN DE L’ENSEMBLE DES MISSIONS AU SEIN DU MINISTERE DU TRAVAIL ET DE L’EMPLOI ET LE RECRUTEMENT MASSIF D’AGENT.ES POUR LES EXERCER

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