Réforme de l’Etat : assez de restructurations !

Fusion des régions, réforme territoriale… C’est, dans la précipitation et dans la confusion, à une nouvelle restructuration du ministère du travail et de l’emploi que nous allons être prochainement confrontés (voir encadré) ! Elle concernera les missions de l’emploi et de la formation professionnelle. Elle concernera aussi, dans le cadre de la fusion des régions, l’implantation et les missions des services dans lesquels nous exerçons aujourd’hui !

Au ministère du travail et de l’emploi, c’est l’opacité qui prime. Les informations sont distribuées avec parcimonie aux organisations syndicales, comme l’a constaté la CGT, qui s’est rendue les 19 janvier et 13 mars derniers à deux réunions d’information sur le sujet.

Dans le cadre de la revue des missions, les DIRECCTE ont dû faire des propositions sur les mutations économiques, le positionnement de l’Etat en matière de développement économique et les priorité des l’Etat dans la conduite des politiques partenariales. Nul doute que les services de l’emploi seront concernés… mais la liste des missions qui pourraient être transférées aux Régions, voire abandonnées ou externalisées sous couvert de « simplification », n’est pas connue – hormis pour la gestion du FSE puisqu’un décret la transférant aux régions est prêt.

On ne sait pas non plus quelle sera la répartition des compétentes entre Etat et régions puisque la loi NOTRe est toujours en discussion au parlement. Enfin, les lettres de mission des inspecteurs généraux chargés de faire des propositions d’organisation territoriale des services de l’Etat n’ont pas été communiquées.

Surtout, on ne sait pas bien comment tout cela va s’articuler. Pourtant, le calendrier s’annonce très serré puisque des « feuilles de route » de nouvelle organisation vont être élaborées pour chaque ministère pour le mois d’avril avant consultation des organisations syndicales. Le tout sous « pilotage » du ministère de l’intérieur et arbitrage du premier ministre lui-même !

Les préfets de région sont invités à travailler sur un « état des lieux », avec nomination en avril 2015 d’un préfet « préfigurateur » par future grande région et d’un « chef de projet ». Les capitales de région devront être désignées d’ici fin 2015… et pourront être modifiés en 2016 après les élections régionales !

S’agissant du ministère du travail, le ministère prévoit un suivi au niveau des comités techniques régionaux (CTSD) au niveau du comité technique ministériel (CTM). Des rapports prévoyant une « organisation cible » interrégionale seront rendus dans le courant du mois de mars. Joël Blondel (DRH) a indiqué qu’un « plan RH » d’accompagnement sera élaboré pour mars… avec éventuelle application de la loi mobilité !

Ce « suivi » sera largement fictif : le calendrier est fixé, la feuille de route qui va engager le ministère du travail et de l’emploi sera bouclée en 3 mois dès que les arbitrages interministériels seront rendus.

Une chose est sûre : les suppressions de postes vont continuer (- 150 postes prévus en 2015, après – 278 ces deux dernières années au ministère)… et on ne va pas demander leur avis aux agents alors que ce sont leurs postes, leurs lieux de travail, leurs missions qui sont en jeu.

Ainsi, en Bourgogne (qui va fusionner avec la Franche-Comté), c’est par un simple mail que la DIRECCTE annonce à la mi-décembre à tous les agents que la revue des missions est déjà bouclée ; que les DIRECCTE vont fusionner et que l’un des scénarii envisagés est celui du maintien d’un siège dans la future capitale de région et d’une antenne régionale ailleurs ; que l’identification des postes « doublons » est en cours et qu’il faudra tenir compte de l’organisation des conseils régionaux !

Dans d’autres régions, l’encadrement des DIRECCTE anticipe déjà la concurrence pour le choix des futurs sièges régionaux (Toulouse contre Montpellier ; Dijon contre Besançon…) et cherche à placer ses billes.

La CGT dénonce les choix gouvernementaux, qui portent ni plus ni moins que sur l’organisation territoriale des services publics et leur contenu, au mépris de tout débat démocratique. L’urgence pour les populations et les usagers, ç’aurait été de renforcer la proximité territoriale et les moyens des services publics, sûrement pas de favoriser les batailles d’ego entre barons locaux !

Au ministère du travail, la CGT dénonce une nouvelle restructuration quelques années seulement après la RGPP et la création des DIRECCTE conçue comme un guichet unique au service des entreprises, et en pleine mise en œuvre de la réforme de l’inspection du travail.

Une nouvelle fois, les collègues sont placés devant le fait accompli, avec non seulement de conséquences en terme d’organisation interne mais aussi de localisation des services… Comment seront traités les doublons ? Que deviendront les actuelles unités territoriales, les missions, les postes actuellement occupés par les collègues ? Les contrats des agents non titulaires vont-ils être renouvelés ? Ces inquiétudes ne peuvent être traitées au détour de quelques réunions…

C’est pourquoi la CGT revendique :

– que toutes les informations soient données aux agents sur les négociations en cours entre les régions fusionnées et sur les projets de réorganisation des DIRECCTE ;

– l’abandon des projets de réformes territoriales qui, en confiant en confiant la formation et demain l’emploi aux régions va accentuer la pression du patronat pour que soit satisfait ses besoins immédiats de main d’œuvre au plus bas coût pour le capital ;

– le maintien de tous les services, de tous les agents et de tous les postes dans les implantations actuelles. Zéro suppression de postes ! Aucune fin de contrat pour les agents non titulaires ! Aucune délocalisation ! Aucune mutation ou déménagement forcés !

– l’arrêt de l’abandon des missions et compétences de l’Etat, seul moyen pour garantir une équité territoriale nationale; Non à la décentralisation !

– l’arrêt des restructurations incessantes des Pôle 3 E qui génèrent des conditions de travail totalement dégradées pour les agents ;

– la titularisation des contractuels, nombreux dans les services de l’emploi et de la formation professionnelle.

Le 9 avril, tous et toutes en grève pour affirmer et porter ces exigences !

Bandeau manif

La « réforme de l’Etat » comprend plusieurs volets :

– la poursuite de la MAP (modernisation de l’action publique), ex-RGPP qui avait conduit à la création des DIRECCTE

– une nouvelle « revue des missions » qui consiste à « déterminer les domaines d’action prioritaires de l’Etat » et faire le bilan de certaines des missions exercées par les DIRECCTE

– la fusion des régions

– la loi NOTRe (nouvelle organisation territoriale de la République) qui va redéfinir les compétences respectives de l’Etat central et des régions (fusionnées)

Déjà, la loi sur la formation professionnelle ayant décentralisé encore davantage les missions de la DIRECCTE en matière de formation aux conseils régionaux (apprentissage notamment). Le Ministère Fort de Sapin/Rebsamen s’inscrit pleinement dans ce cadre. Il est difficile d’apprécier à ce stade quelles seront les conséquences concrètes pour les missions de l’emploi et de la formation professionnelle restantes, mais le pire est à craindre.

Au vu des débats parlementaires sur la loi NOTRe, les évolutions de ces dernières années devraient être accentuées et gravées dans le marbre :

– positionnement de l’Etat non plus comme intervenant direct sur le marché du travail et dans les politiques de l’emploi et de la formation mais comme « stratège » et « coordonnateur » d’une multiplicité d’opérateurs publics ou privés ;

– passage à une « gouvernance quadripartite » Etat / Régions / Syndicats et patronat / Chambres consulaires sous présidence du préfet de région et du président du Conseil régional, avec le risque d’une hégémonie des régions au vu du retrait de l’Etat dans la gestion des politiques de l’emploi

– participation accrue de la région dans la coordination des actions et des intervenants du service public de l’emploi local qui deviendrait de plus en plus vidé de son contenu

– les régions qui le demanderaient pour obtenir une « délégation de compétences » pour la gestion d’une partie des politiques de l’emploi : suivi des demandeurs d’emploi, dont les maisons de l’emploi, les PLIE ; transferts de crédits d’Etat aux régions…

La restructuration qui s’opère pourrait sonner le glas de l’intervention de l’Etat en matière d’emploi en transférant aux opérateurs intervenant déjà dans ces domaines les missions qui n’auraient pas été confiées aux régions par la loi NOTRe (IAE, contrats aidés, TH notamment), tout en poursuivant les suppressions de postes et la suppression de moyens pour l’insertion des publics en difficulté (Maisons de l’emploi, Fonds d’insertion pour les jeunes, parrainage, etc.) et de mise en concurrence des acteurs du service public de l’emploi avec des opérateurs à but lucratif (IEJ).

Paris, le 18 mars 2015

Lire et télécharger le tract

Lire la lettre ouverte adressée par la CGT au DIRECCTE de Champagne-Ardenne

Lire la lettre ouverte adressée par la CGT au DIRECCTE d’Auvergne