Lettre ouverte CGT-SUD-FSU-CNT à la ministre sur les remontées chiffrées de l’inspection du travail

Madame la ministre,

Nos organisations syndicales ont pris connaissance cette semaine du compte-rendu très détaillé que les inspecteurs et contrôleurs du travail sont requis de remplir quant à leur activité depuis la proclamation de l’état d’urgence  sanitaire et le confinement qui s’en est suivi, soit en d’autres termes, depuis qu’il leur a été demandé, voire imposé, d’accomplir l’ensemble de leurs tâches administratives à domicile et, au-delà, de pratiquer des contrôles à distance, voire virtuels.

S’il est naturel que les agents publics rendent des comptes au public, conformément aux dispositions de l’article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, une telle demande laisse pour le moins perplexe.

En effet, alors même d’une part, que notre pays traverse une situation d’urgence non seulement sanitaire mais également sociale, pendant laquelle il est plus que jamais nécessaire que les inspecteurs et contrôleurs du travail se mobilisent pleinement pour faire – difficilement – respecter les règles protectrices de la santé des travailleurs, une telle demande de quantification minutieuse de leurs actions passées, en ce qu’elle les détourne de l’exigence présente est pour le moins paradoxale.

Au-delà et surtout, nous constatons que cette demande a été formée peu après la mise à pied, particulièrement choquante, d’un collègue inspecteur du travail, Antony Smith, dont l’unique tort est d’avoir pleinement accompli les missions qui lui sont dévolues par la loi. Au demeurant, le seul fait que d’ores et déjà près de 120 000  personnes aient signés une pétition pour le soutenir démontre à quel degré cette mesure est inacceptable

A l’évidence votre demande, alors même que l’inspection du travail est clairement muselée depuis la mise en place de cette urgence sanitaire – avec notamment l’obligation faite à nombre d’entre eux, d’obtenir l’autorisation de leur hiérarchie avant tout contrôle – ne vise qu’à vous permettre de vous prévaloir devant  la presse et supposément donc face au public, des actions que les uns et les autres, le plus souvent contre cette hiérarchie même ou à tout le moins sans son appui, ont pu mener.

En conséquence, et tant que la mesure disciplinaire prise à l’encontre d’Antony Smith ne sera pas levée et au-delà, désavouée par vous-même, nos organisations syndicales s’opposeront à cette instrumentalisation de l’action des services, comme faire-valoir et simple contre-feu et appelleront l’ensemble des agents à ne pas renseigner ce questionnaire.