Déclaration CGT-SUD-FSU au CHSCT-M du 23 mars 2018

Hier, à l’appel de l’ensemble des organisations syndicales, nous étions en grève.

Nous étions en grève pour défendre le service public face aux attaques faites aux missions (Cap 22) et aux effectifs (120 000 suppressions de postes et plan social annoncé), et pour défendre les salaires et les conditions de travail, nos instances représentatives face à des velléités de réduction de leur nombre et de leurs pouvoirs.

Plus particulièrement au sein du Ministère du Travail, nous étions en grève contre les 239 postes supplémentaires supprimés au sein du Ministère, qui s’ajoutent à la longue liste des postes déjà supprimés dans les services emploi, dans les services de l’inspection du travail et dans les services support, pour la titularisation des personnels précaires de nos services et pour des recrutements statutaires.

Les réductions d’effectifs du Ministère, combinées au développement des postes à portée managériale et hiérarchique, au détriment des postes opérationnels, sont telles que c’est la viabilité même de nos missions qui est aujourd’hui menacée. Doit-on rappeler que 48% des agent.es des services de renseignement seront parti.es d’ici 4 ans ? C’est la survie même de ce service qui est aujourd’hui menacée alors qu’on projette de leur rajouter des tâches.

Au-delà du service public, ce sont les conditions de travail des agent.es qui sont directement impactées.

Nous assistons à la croissance incontrôlée de la charge de travail, induite par les restructurations, sans oublier la surcharge mentale due aux changements incessants des cadres de travail. Il s’avère que les deux dernières expertises menées sur les services de renseignements et sur ceux de l’emploi ont justement sonné l’alerte quant aux besoins de recrutement, et l’urgence d’une stabilisation des effectifs dans ces deux services. Ces dernières études ne viennent que conforter les informations collectées auparavant par le CHSCT-M au cours d’enquêtes menées à son initiative, par exemple celle sur la gestion catastrophique de la réforme territoriale et l’application de la loi NOTRE dans les DIRECCTE.

Le gouvernement et ses administrations justifient ces suppressions par une soi-disante évolution numérique (numérisation des demandes et des traitements). Parlons-en de l’évolution numérique au sein de notre ministère et du caractère parfaitement inadapté des outils fournis par le système informatique du Ministère (de WIK’IT, dont l’ergonomie a été remise complètement en cause par expertise ; des applications dédiées emploi développées sans cohérence ; de RENOIR-RH ; de CHORUS DT qui complique la vie à des milliers d’agent.es au quotidien)… On nous impose sans concertation le bridage de la taille des boîtes Outlook, une utilisation non réfléchie et non régulée des boites mail. Enfin, les changements incessants de mots de passe, de plus en plus complexes, la multiplication des logiques de « self-service » font de l’agent.e son propre client, et dans le même temps, le système informatique de plus en plus centralisé et les dysfonctionnements et pannes de réseau mettent hors de leur portée l’intervention des collègues d’un service informatique jadis de proximité.

Au-delà des questions d’effectifs et de moyens, nos organisations déplorent également les violences sexistes et sexuelles au sein du ministère du travail.Les organisations syndicales CGT-CNT-SUD ont lancé en novembre dernier une campagne contre ces violences subies par les femmes au ministère du travail. Les réponses au questionnaire mis en ligne révèlent que le ministère du travail n’est pas épargné. Ainsi, concernant les agissements sexistes – comme les blagues sexistes ou sexuelles récurrentes, les propos sur l’apparence ou la vie personnelle, ou encore les préjugés sur les femmes –, sont très présents et restent pour la plupart totalement déniés et impunis. De même, les réponses révèlent que des violences sexuelles existent au sein de nos services : attouchements, harcèlement et viols ; nous ne sommes pas épargnés par ces violences. Là aussi, c’est souvent l’impunité la règle, comme le démontre l’agression d’une collègue avec des gestes violents et un comportement comprenant des propos à caractère sexuel traité par la hiérarchie par l’exfiltration de l’agresseur !

Nous constatons que malgré les divers labels dont se prévaut le ministère « diversité », « égalité », les mesures de prévention que celui-ci souhaite mettre en œuvre au sein des services – qui n’ont toujours pas été soumises à ce jour à la consultation du CHSCT-M en dépit de nos multiples demandes en ce sens – n’est pas à la hauteur des enjeux. Ainsi le « bilan du dispositif et projet de plan d’action 2018 »
transmis aux élu.es du CTM est très insuffisant et inconsistant. Concernant le bilan d’abord, rien sur les plaintes remontées, les alertes détectées, les suites qui y ont été données, etc… Le plan d’action, défini sans moyens spécifiques, est très en deçà du projet de circulaire de lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans la fonction publique qui prévoit à terme la formation de tous les agent.es alors que vous ne prévoyez que de former l’encadrement.

Nos organisations syndicales exigent l’application immédiate dans nos services des textes existant dans la fonction publique, et revendiquent en particulier :

  • des notes de service précisant les procédures à suivre si un cas de sexisme ou de harcèlement survient, incluant une enquête, traitée sans retard en cas de plainte ainsi que des sanctions si les agissements sont établis ;
  • la formation de TOUT.E.S les agent.e.s à ne plus subir et à dénoncer ces propos et agissements ;
  • la sensibilisation et la formation adéquate des responsables hiérarchiques ;
  • ces formations devront être dispensées par des associations féministes ;
  • la garantie pour les victimes de bénéficier de protections : soutien et, si nécessaire, aide à leur maintien et à leur retour dans l’emploi ainsi que, en premier lieu, de la protection de leur plainte ou témoignage ;
  • l’effectivité de la protection fonctionnelle dans les cas de harcèlement sexuel ;
  • une politique de prévention à soumettre au CHSCT.

Nous soulignons également depuis des mois déjà les fortes attaques antisyndicales dont sont victimes les représentants syndicaux au sein des services. Alors qu’une camarade s’est retrouvée suspendue pour avoir participer à une manifestation et tenu des propos syndicaux, en mentionnant expressément son appartenance syndicale, pour violation de son devoir de neutralité, le RUD du 77, lui, organise une réunion de service dans les locaux du deuxième employeur du département, ce que dénoncent les organisations syndicales ainsi que la dégradation
des conditions de travail des agent.es, et dénigre devant l’ensemble du personnel, les représentants syndicaux de l’UD, les accusant ni plus ni moins que de terroriser le personnel, et se permet d’agripper une représentante syndicale. Depuis aucune enquête paritaire, ni enquête du CHSCT n’ont été diligentées, aucune mesure n’a été prise, et c’est l’agente elle-même qui a du solliciter une mesure d’éloignement conservatoire.

Et quand ce ne sont pas les représentants syndicaux qui sont visés, ce sont les instances, et particulièrement les CHSCT qui sont bafoués !

Concernant le 77 toujours, la DIRECCTE d’Ile-de- France refuse la convocation du CHSCT régional, renvoyant dans un premier temps au CHSCT local, présidé par le RUD mis en cause ! A ce jour cette instance locale ne peut plus fonctionner, et les agent.es sont laissé.es sans CHSCT, malgré des signalements de divers agissements violents déclarés sur le registre.

Dans les Hauts de France, la DIRECCTE ne respecte pas les droits des instances, ni les représentants ; dans le Grand-Est, l’ensemble des instances est également paralysé face aux comportements de la DIRECCTE.

Notre administration, non seulement ne joue pas son rôle de garant des droits des instances, se contentant de regarder la situation de loin, mais prévoit ni plus ni moins que la suppression des CHSCT des anciennes régions fusionnées, les remplaçant par des commissions locales hygiène sécurité sans réel pouvoir ou moyen, et des CHSCT de plus en plus éloignés des collectifs de travail.

Nous demandons donc, bien évidemment le respect des prérogatives et des moyens des CHSCT, le maintien du nombre des CHSCT existants et un CHSCT compétent pour les inspecteu/rices élèves du travail.

Au regard de ce qui précède, nos organisations syndicales demandent à ce que les suppressions d’effectifs, les réorganisations induites et les impacts sur la charge de travail, l’utilisation des outils informatiques et la question des violences sexistes et sexuelles soient abordés en priorité, et demandent que soit inscrits exclusivement les points suivants à l’ordre du jour d’une réunion extraordinaire du CHSCT-M dans les deux mois :

  • étude d’impact concernant les effets sur les conditions de travail de l’utilisation de l’ensemble des outils, logiciels, systèmes informatiques tel que WIK’IT (dont nous attendons un bilan consolidé des consultations des CHSCT R sur les conditions de mises en œuvre), de Renoir RH pour lequel nous avions demandé la consultation du CHSCTM avant mise en œuvre, CHORUS DT, et autres applications métiers ;
  • consolidation de l’ensemble des éléments disponibles concernant les risques psychosociaux (enquête CHSCT, DUER Régionaux, Expertise, alerte des médecins….) en vue d’une évaluation nationale permettant de travailler sur un plan de prévention spécifique tout en intégrant les conséquences en terme de TMS.
  • point d’étape sur la mise en œuvre des préconisations du rapport de l’enquête conjointe DRH/CHSCT-M sur la restructuration des DIRECCTE dans le cadre de la réforme territoriale ;
  • présentation du plan de prévention suite à l’expertise « Emploi » comme demandé par le CHSCT-M du 09/02/18, intégrant « toutes les données spécifiques au champ de l’emploi : prévisionnel des effectifs sur 10 ans, charge de travail – identification des goulots
    d’étranglement actuels, inventaire des outils informatiques et éléments d’évaluation, signalements des tentatives de suicide sur 5 ans ;
  • étude de l’ensemble des signalements de cas de violences sexistes et de discriminations sexistes sur 5 ans, ainsi que les premiers éléments relatifs à l’application concrète de l’accord contre les discriminations.

Enfin, comment ne pas finir cette déclaration par une expression concernant l’exposition passive à l’amiante dans de nombreux locaux occupés par nos collègues de travail.

Comme nous l’avons récemment signalé à la DRH, l’exposition passive à l’amiante peut malheureusement s’avérer mortelle à l’instar du décès de notre collègue du Mans, victime de l’absence de mesures de protection prise par l’administration pour le protéger de l’inhalation de fibres d’amiante. Malheureusement, force est de constater que de nombreux collègues sont aujourd’hui exposés à des matériaux amiantés dégradés et à un risque d’inhalation de la fibre tueuse. Tour Bretagne à Nantes, locaux de la DIRECCTE à St-Brieuc, Cité Administrative de Rouen… ceci n’est que la courte liste des situations actuelles extrêmement inquiétantes.

Force est de constater que le traitement des situations d’expositions actuelles ou passées sont extrêmement différentes d’un site à l’autre. La DRH du ministère ne peut se contenter de diffuser une brochure sur la prévention du risque amiante ; elle doit prendre toutes mesures, telles que le rappel à l’ordre des chefs de service, lorsqu’il est établi un manquement dans la mise en œuvre des mesures de prévention. Comment comprendre que nos collègues de Paris occupant l’immeuble Albert aient été évacués, à juste titre, suite à la découverte de joints amiantés dégradés alors qu’à situation similaire, le DIRECCTE de Normandie s’en tient à des mesures de consignes et d’affichage. Et cela, sans
compter la récente annonce de la préfète de Seine Maritime entendant annuler les décisions conservatoires de protection prises par le DIRECCTE, le DREAL et le DRFIP concernant les joints dégradés et amiantés de la cité administrative de Rouen.

Pour chacune de ces situations, nous demandons une intervention écrite de la DRH exigeant la mise en œuvre des mesures de protection adéquates, dont l’évacuation des locaux quand cela s’avère nécessaire.

Télécharger la déclaration intersyndicale