Compte-rendu du CTM audio du 28 mai 2020

Convoqué sur demande des organisations syndicales, l’administration a fixé l’ordre du jour suivant, en supprimant le point demandé sur la suspension d’Anthony Smith :

  • plan de déconfinement progressif : principes et modalités de déploiement
  • télétravail
  • baromètre « conditions de travail en période de confinement »
  • titularisation des ITS et le déroulé de leur formation
  • titularisation des IET et le déroulé de leur formation
  • effectifs 2020 du ministère du travail et notifications de plafond d’emploi aux services déconcentrés
  • covid/maladie professionnelle

Nous avons demandé un point supplémentaire sur la prime Covid dont les agents de nos services devraient bénéficier, mais convoqué à 14h30, en audio, de nombreux points de ce CTM n’ont pas pu être traités.

Déclaration des élu-es CGT

Nous sommes aujourd’hui dans une situation invraisemblable : notre collègue et camarade, Anthony Smith, est suspendu dans « l’intérêt du service » depuis 43 jours, alors qu’il faisait simplement son travail, en enclenchant une procédure en référé pour obtenir des moyens de protection adéquats pour les salariés d’une association d’aide à domicile, contre le covid 19. Son action était au coeur des missions de l’inspection du travail. 43 jours que notre camarade est dans l’incertitude ! 43 jours sous la pression d’une convocation ou non de la CAP disciplinaire ! 43 jours que l’administration « réfléchit ». Il serait insupportable pour Anthony, pour son organisation, pour ses dizaines de milliers de soutiens que vous osiez jouer la montre et alliez jusqu’au bout du délai réglementaire de 4 mois !! Quel est le message de cette suspension ? Intimider les agents ? Envoyer un message aux employeurs contre l’inspection du travail et contre la protection des salariés ? Dans tous les cas, c’est inadmissible et vous devez mettre immédiatement fin à cette procédure.

Vous devez prendre la mesure de la situation ! La suspension d’un inspecteur du travail qui essayait de faire son travail, au bénéfice de la santé des travailleurs, malgré toutes les difficultés de la période, a provoqué une mobilisation sans précédent, en défense de l’inspection du travail et de son indépendance :

  • près de 150.000 signatures pour la pétition nationale ; 150 personnalités signataires d’une tribune de soutien dans la presse ;
  • les représentants des organisations politiques de toute la gauche signataires d’un courrier au 1er Ministre et des interpellations fréquentes et régulières de nombreux parlementaires ;
  • une demande de rendez-vous auprès de la Ministre du travail émanant de tous les niveaux de la CGT, de l’Union départementale de la Marne à la Confédération ; faisant suite à la condamnation du gouvernement français par la confédération européenne des syndicats. La CES a indiqué « nous exigeons le respect de l’indépendance de l’inspection du travail (…) et condamnons toute sanction des inspecteurs qui tentent d’imposer les mesures prévues par le code du travail (…)»
  • 1200 agents des services signataires d’un appel public demandant la réintégration d’Anthony ;
  • des mobilisations aux quatre coins de la France, des banderoles sur les murs de vos bâtiments administratifs avec des messages particulièrement clairs…

Cette mobilisation s’inscrit en outre dans le cadre d’une saisine inédite de l’OIT, en intersyndicale, tant les atteintes à l’inspection du travail et à son indépendance ont été nombreuses au cours de cette période, au-delà du cas de notre camarade. Le muselage de l’Inspection du travail auquel vous avez tenté de procéder n’est pas passé inaperçu et a déclenché un véritable tollé ! Faites marche arrière !

Nous vous demandons solennellement de lever la suspension d’Anthony et de le rétablir immédiatement dans ses fonctions.

Ce CTM extraordinaire est également censé répondre aux nombreuses questions des ITS sur la poursuite de leur formation et leur titularisation, puisque pour eux et plus largement pour l’ensemble des agent.e.s placé.e.s statutairement sous l’autorité de l’INTEFP, le temps s’est arrêté le 13 mars 2020.

Malgré nos multiples relances, nous déplorons l’absence de documents préparatoires sur le sujet. Et pourtant, voilà plusieurs jours, une note rédigée par M. Bernard, DRH des Ministères Sociaux et traitant précisément de ce sujet a été envoyée aux DIRECCTE. Bien sûr, ce projet de note n’a pas été communiqué aux élus, ce qui constitue une obstruction manifeste.

En effet, depuis plus d’un mois, l’ensemble des organisations syndicales se sont exprimées pour vous demander un plan de reprise. Ce plan devait aborder la poursuite de la formation des ITS et les contraintes qui lui sont attachées, mais aussi la date de leur titularisation ou encore les dates de leurs congés d’été. Ce plan, qui devait être discuté lors d’une « réunion d’urgence » (sic) le 22 avril avec l’INT, n’est toujours pas dévoilé ce jour, le 28 mai. Ce plan, qui devait dissiper les inquiétudes et répondre aux nombreuses questions qui intéressent les ITS, mais aussi les collègues des services où ils sont censés prendre leur poste et qui subissent les intérims sans fin et la surcharge de travail.

Par ailleurs, nous n’oublions pas les IET et les agent.e.s qui attendent les dates et les modalités d’examen du CRIT 2020. Le silence de l’administration est pour le moins incompréhensible et traduit le peu de considération de la DRH et de l’INTEFP à leur encontre.

Pour toutes ces raisons, nous exigeons la titularisation dès le 16 juin de tout.es les ITS sans oral.

Au cours de ce CTM, vous devez également nous faire moult points d’information sur le télétravail, le déconfinement progressif ainsi que sur le baromètre « conditions de travail en période de confinement ». Avant de vous lancer, nous tenons à rappeler que vos indicateurs et autres baromètres n’abordent pas la question pourtant centrale du manque de moyens. Les difficultés rencontrées par les agent.e.s sont liées à la qualité médiocre du réseau et au manque de matériel informatique dans bien des cas. Mais surtout, les services informatiques, sollicités comme jamais lors de la dernière période subissent la baisse de leurs effectifs au gré des réformes et autres restructurations.

Affirmez-vous toujours aujourd’hui que le « télétravail doit demeurer la norme » ? En Nouvelle Aquitaine par exemple, le DIRECCTE demande à tous les agent.es (mail du 27 mai) de revenir 2 jours par semaine au bureau (les contrôles doivent se faire en dehors de ces jours). Et pour les agent.es qui n’ont pas d’ordinateur portable, ils.elles devront travailler en présentiel toute la semaine ou transporter leur matériel entre le domicile et le travail. Le risque de contamination par la covid 19 qui demeure a t-il été évalué ?

S’agissant du travail effectué par les agents depuis leur domicile, vous ne répondez toujours pas à nos demandes, s’agissant de l’indemnisation des agents qui ont eu des frais ; le décret du 11 février 2016 est pourtant clair : « L’employeur prend en charge les coûts découlant directement de l’exercice des fonctions en télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci ». La CGT demande l’application de ces dispositions.

Vos baromètres et autres indicateurs gardent également le silence sur le traitement discriminatoire dont les agent.e.s (pour beaucoup des catégories C) dont les activités ne sont pas télétravaillables font l’objet : placé.e.s en autorisation spéciale d’absence d’office, i/elles subissent le retrait de jours de congés du fait de l’inique ordonnance Dussopt du 15 avril. La CGT exige toujours le retrait de cette ordonnance.

Et on ne parle même pas de l’explosion des risques psychosociaux que votre questionnaire se garde bien de vraiment aborder, notamment en contournant l’épineuse question de conciliation vie personnelle / vie professionnelle. De nombreux agent.e.s se sont retrouvé.e.s à devoir gérer de front la garde des enfants, l’enseignement en « distanciel », avec des rappels à l’ordre réguliers sur l’importance de l’instruction « obligatoire », le travail à distance, avec des injonctions contradictoires,… Le tout dans un contexte fortement anxiogène et bien évidemment, sans aucune forme de soutien de la hiérarchie, toujours obnubilée par les chiffres ! Bref de quoi devenir fou/folle, tout simplement !

Enfin, la période a été propice aux attaques tous azimuts sur le droit du travail au nom de la sacro-sainte reprise économique et l’Etat dépense sans compter pour les entreprises qui font des profits faramineux. Pourtant, certains, comme Renault préparent des plans de licenciements d’envergure. Renault, qui bien qu’annonçant la fermeture de 4 sites et des milliers de licenciements va percevoir 5 milliards d’euros des contribuables. Quant aux travailleur.euses, ils.elles ont subi des ordonnances qui allongent la durée du travail jusqu’à 60 heures dans certains cas et qui remettent en cause leurs droits aux congés.

Ils ne se satisferont pas des remerciements pathétiques du gouvernement pour saluer leur engagement durant la crise.

Il faut augmenter les salaires, réduire le temps de travail et embaucher.

La CGT rappelle son engagement pour un Ministère du travail au service des travailleur.euses

Réponses et non-réponses de l’administration

Sur la suspension d’Anthony Smith, le DRH a tout d’abord très rapidement botté en touche : « Des discussions sont en cours, je ne suis pas mandaté pour en parler » et il a enchaîné sur le 1er point de l’ordre du jour, en cherchant manifestement à monopoliser la parole et à tirer avantage des difficultés liées à l’audio-conférence. Un représentant de la DGT, globalement quasiment absente de ce CTM, a finalement daigné se connecter et nous en avons bien entendu profiter pour revenir à la charge. La discussion a été tendue, mais le DRH a finalement répété que ce CTM n’était « pas le lieu » pour traiter de cette question, mais il a précisé que nous pouvions être « certains » qu’une issue était en train d’être recherchée et qu’elle serait trouvée. Après 43 jours d’une suspension aussi injustifiée qu’inacceptable, nous ne sommes évidemment pas rassurés. Nous appelons les centaines de collègues et les dizaines de milliers de soutiens d’Anthony Smith à continuer à se mobiliser, en défense de l’inspection du travail, de son indépendance, pour obtenir la réintégration immédiate et l’abandon de toute procédure disciplinaire.

Sur les effectifs, le point n’a pas vraiment été traité, mais le DRH, en réponse aux déclarations préalables, a annoncé qu’il avait demandé l’abandon de la baisse des effectifs prévue pour 2020 (pour rappel : – 2,6%) et qu’en l’absence de retour négatif de Bercy, il appliquait les schémas d’emploi 2019, sans la baisse d’effectif de 2,6%. Les effectifs 2020 sont donc notifiés sur la base 2019, sans aucune diminution et les DR sont autorisées à recruter sur cette base, dès à présent. Il aura donc fallu pas moins d’une pandémie pour que l’hémorragie de nos effectifs cesse, du moins pour une année ! Ce n’est évidemment pas seulement à la baisse prévue pour cette année qu’il faut renoncer ! Il est temps de comprendre que les coupes drastiques effectuées au cours de toutes ces dernières années dans tous les secteurs de la Fonction publique sont responsables de la dégradation des services publics et donc de la gestion pour le moins chaotique de cette crise sanitaire. Nous ne nous satisfaisons évidemment pas de ce statu quo pour l’année 2020 et maintenons nos revendications en vue d’un accroissement massif de nos effectifs, pour toutes les catégories.

Sur le déconfinement dans les services, le DRH continue à insister sur son caractère progressif impératif, en contradiction avec les consignes qui tombent dans certaines DR : le présentiel est à redéclencher « au goutte à goutte », avec beaucoup de précautions et le télétravail ou travail à distance est toujours à privilégier. Dès que le lien peut être établi avec le service, sous une forme ou sous une autre, l’agent peut être positionné en « travail à distance ». Ce point mériterait également d’être clairement rappelé à certaines DR qui conditionnent travail à distance et équipement informatique qui ne peut toujours pas être fourni à tous les agents, alors que de très nombreuses solutions existent. Le DRH s’est dit prêt à produire une note complémentaire pour clarifier ces points. Il serait temps ! Dans les services, la pression monte pour un retour massif en présentiel et la limitation maximale des autorisations d’absence, dès le 2 juin !
La discussion a également porté sur les masques. Des masques « grand public » auraient été massivement distribués dans les services déconcentrés pour que les agents puissent en porter au bureau, et des masques chirurgicaux en nombre pour les agent.es de contrôle… Mais personne n’en a vu la couleur dans les services !! Le DRH a semblé surpris.

Nous voilà donc revenu à l’une des questions les plus entendues du confinement : où sont les masques ??? Les DR ont-ils décidé de les garder pour plus tard ? De décorer leur bureau ? De les stocker pour les détruire quand on les retrouvera dans 10 ans ?

La discussion s’est évidemment compliquée s’agissant des masques FFP2 ou FFP3, seuls à même de réellement protéger les agents qui, dans le cadre de leurs activités professionnelles, seraient amenés à ne pas pouvoir respecter les « gestes barrières ». Ces masques ne sont pas disponibles, au-delà des stocks, le plus souvent périmés et très restreints, livrés dans les DR. Est-ce à dire que sans masque FFP2, les agents susceptibles d’être exposés, ne doivent pas s’exposer ? Et donc que les agents de contrôle deb l’inspection du travail, par exemple, ne doivent pas procéder à des contrôles ? Silence radio de la DGT et embarras du DRH… Quant au médecin de prévention, il explique clairement que si les règles de distanciation sociale ne sont pas possibles, il faut renoncer au contrôle. Pour la CGT, cette position est inacceptable ! Elle a pour effet d’entraver l’action des agents de l’inpection du travail ! Pourtant des masques FFP2 ou FFP3, il y en a ! Dans la plupart des grandes entreprises ! Une fois de plus les priorités du Ministère du travail sont affichées : l’activité économique est la priorité absolue et les contrôles de l’inspection du travail sont clairement entravés !

S’agissant du retrait des jours de congés pour les agent.es placé.es en ASA, la CGT a rappelé son opposition à ces ordonnances iniques et discriminatoires qui visent tout particulièrement des femmes catégorie C, qui n’ont pas pu travailler du fait des carences de l’administration à fournir les moyens pour le faire ! La DRH se refuse à ne pas l’appliquer, tout juste, a-t-elle rappelé que tout.e agent qui a été sollicité pendant la période de crise alors qu’il ou elle était placé.e en ASA, ne devait pas être considéré dans cette situation administrative.

La DRH a demandé de la souplesse aux services en intégrant « le plus rapidement possible les collègues aux collectifs de travail » et en les invitant à une appréciation large du travail à distance, c’est écrit dans la FAQ. Tout cela est pour le moins nébuleux, mais si vous avez travaillé durant la période et que vous estimez que le nombre de jours de congés retirés est disproportionné, rapprochez-vous de vos représentant.es CGT.

S’agissant du baromètre social « spécial confinement », le questionnaire pouvait être rempli encore cette semaine et les résultats nous seront diffusés. Nous avons pointé les limites de ce questionnaire très fermé, mais nous n’en avons pas vraiment besoin pour connaître l’ambiance dans les services et les effets du confinement sur les conditions de travail : mauvaise et délétères !

Sur les ITS, la DRH a finalement opté pour une solution pragmatique qui nous semblait assez évidente, mais qui était loin d’être acquise en début du confinement : pas de jury et titularisation des collègues, à la date initialement prévue (au 15 juin) pour permettre leur prise de poste. Les formations complémentaires nécessaires seront suivies entre septembre et décembre, après prise de contact et analyse des besoins auprès de chaque collègue. A partir de septembre, la DRH envisage donc en alternance travail sur le poste d’affectation et des modules de formation en présentiel (4) et en distanciel.

Sur les IET, le calendrier prévu de la formation et de la titularisation est maintenu. L’architecture de la formation et l’évaluation des IET, fixées par arrêté, ne pourraient pas être modifiées par le truchement des textes « urgence sanitaire », comme pour les ITS. Nous avons un sérieux doute sur ce point et il nous semble que le processus d’évaluation / titularisation aurait également dû être aménagé. Il sera, par exemple, très difficile de produire un rapport de stage dans les conditions actuelles de fonctionnement des services ! Ce qui est proposé à ce stade :

  • reprise des modules de formation, en « distanciel », le 3 juin, après équipement informatique complémentaire des IET qui en avaient besoin ;
  • stage dans les services du 29 juin au 31 juillet ;
  • retour en présentiel à l’INT à l’issue des congés d’été (4 semaines en août) pour redéploiement des modules ;
  • suppression de la semaine européenne et raccourcissement du stage de prise de poste ;
  • maintien des dates du jury final : 23 au 27 novembre.

Télécharger le compte-rendu