Lignes directrices en matière de mobilité : la disparition de la compétence de la CAP en matière de mobilité ou l’arbitraire et l’opacité de l’administration

Lors d’une « réunion de travail » en date du 6 novembre 2019, la DRH a exposé aux organisations syndicales un projet des lignes directrices de gestion relatives à la mobilité des agents des ministères sociaux, édictées en application de l’article 30 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

Les « LDG », établies au niveau de chaque ministère qui dispose de marges de manœuvre conséquentes, ont désormais vocation à régir la carrière des agents titulaires et contractuels en CDI en matière de mobilité à compter du 1er janvier 2020. Un décret (non fourni aux organisations syndicales) viendra préciser les principes d’ici la fin de l’année. D’autres lignes directrices seront édictées pour les avancements et entreront en vigueur en 2021. La forme de ce document n’est pas encore fixée, toutefois, ces LDG seront publiées et seront opposables à l’administration.

Le projet communiqué affiche notamment comme « nouveautés » la « déconcentration de la décision du choix des candidats au niveau de chaque recruteur » avec la mise en place d’une « mutation en temps réel ». Toutefois, les objectifs affichés sont clairs et nous ont été rappelés lors de la réunion : éviction des organisations syndicales des questions relatives à la mobilité/avancement et augmentation du nombre de contractuels au sein de l’administration.

A la lecture de ce document, nos craintes sont nombreuses :

  • Absence de transparence sur les postes disponibles: la mobilité n’est plus décidée nationalement mais régionalement, voire même par « service ». Tout passera désormais par le portail « Place de l’emploi public », aucune liste des postes vacants ne sera transmise aux agents ou aux organisations syndicales car, comme l’a précisé la DRH, « La loi FP a été faite pour évincer les syndicats, c’est pas pour qu’ils reviennent par la fenêtre».
  • Absence de transparence sur les critères de départage : les LDG mentionnent la prise en compte d’un « faisceau de critères qui guide l’établissement des priorités» au titre desquels on trouve pêle-mêle le critère très subjectif de « l’adéquation du profil au poste» et, de manière accessoire, les critères légaux de priorité de l’article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 (rapprochement de conjoint, handicap, proche-aidant…). Aucune hiérarchisation n’a été fixée, mais les règles semblent être claires, les LDG rappelant que « la sélection des candidatures [doit être] fondée exclusivement sur les compétences », exit les critères objectifs de rapprochement de conjoints, d’ancienneté ou autres…
  • Des obligations renforcées pesant sur les agents…: l’agent doit postuler sur le portail « Place de l’emploi public » en envoyant un CV et une lettre de motivation, il doit « demander lui-même un entretien auprès des recruteurs » et il ne peut renoncer, sauf cas de force majeure, à être affecté sur le poste demandé. Grande nouveauté également, la fixation par notre ministère d’une durée minimale de 2 ans (et de 3 ans lorsque le poste est situé dans une zone géographique caractérisée par des difficultés particulières de recrutement) et d’une durée maximale sur certains postes, comme à l’inspection, de 8 ans, soit une mobilité forcée !
  • …De simples possibilités pour l’administration: le « recruteur » peut décider, ou pas, de réaliser un entretien et il n’est pas obligé de motiver la décision individuelle de refus. Mais soyons rassurés, les LDG ont également pour objectif de « garantir l’égalité de traitement et l’absence de discrimination », mais étonnamment, à part cette déclaration d’intention, aucune mesure ne figure en ce sens : ni formation des responsables de service, ni rappel des dispositions de « l’Accord sur l’égalité de traitement et la lutte contre les discriminations dans les services du ministère chargé du travail et de l’emploi» de 2017…
  • Une contestation limitée: Alors que la loi de transformation de la fonction publique de 2019 prévoit dans son article 10, à minima que « Les agents peuvent choisir un représentant désigné par l’organisation syndicale représentative de leur choix pour les assister dans l’exercice des recours administratifs contre les décisions individuelles défavorables[…]. A leur demande, les éléments relatifs à leur situation individuelle au regard de la réglementation en vigueur et des lignes directrices de gestion leur sont communiqués. », notre ministère a décidé de cantonner le rôle des organisations syndicales à une mission d’alerte des services et a introduit un recours hiérarchique préalable, en méconnaissance des dispositions précitées.

L’administration fait un tour de passe-passe en mettant en avant, et avant toute chose, ses orientations générales pour les critères de mutation. Les critères éventuellement supplémentaires et non obligatoires deviennent la norme au ministère… alors qu’il n’a aucune obligation d’en produire, ni de définir une durée maximale d’occupation du poste (la loi donne seulement une « possibilité »).

Nous exigeons :

  • la publication d’un avis de vacance national reprenant l’intégralité des postes vacants,
  • l’information des représentant-e-e du personnel de toutes les candidatures sur tous les postes,
  • le maintien des motifs prioritaires de mutation prévus par le statut (article 60)
  • la définition de critères objectifs pour départager les agent-e-s dans les autres situations (ancienneté notamment)
  • pas d’entretien obligatoire ni mise en concurrence directe
  • pas de durée minimale ni maximale sur un poste

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