Message de soutien dans le cadre du rassemblement du 14 décembre 2017 contre la procédure disciplinaire à l’encontre d’une inspectrice du travail (CGT de Seine-Maritime et CGT Le Havre)

L’Union départementale CGT et l’union locale CGT du Havre apporte tout son soutien à votre collègue et camarade Auriane, inspectrice du travail, injustement mis à pied suite à son interview sur la chaine du journal L’humanité.

Nos organisations se sentent particulièrement concernées par cette procédure inédite qui vise à supprimer toute expression syndicale publique de la part des syndicats de l’inspection du travail.

Particulièrement concerné car il s’agit d’une attaque inédite qui risque de se multiplier en absence d’une réaction massive,

Particulièrement concerné dans la mesure où votre camarade a fait le choix de venir exercer votre noble profession sur la zone du Havre dans les jours qui viennent.

Particulièrement concernées, car les militants syndicaux de Seine Maritime, notamment ceux de la CGT, ont été particulièrement visées ces dernières années, par les mêmes types d’attaques, notamment par les procureurs de la République plus enclins à faire condamner ceux qui luttent pour préserver leurs droits que pour poursuivre les employeurs délinquants.

Ainsi :

Ceux que l’on a dénommés « Les 4 du havre », Reynald Kubeycki, Jacques Richer, Pierre Lebas et Dominique Mutel ont été poursuivi dans 2 dossiers différents audiencés le même jour, l’un lié à un collage d’affiche sur les locaux de la député soit disant socialiste du Havre lors du conflit des retraites de 2013 (et oui c’est très grave….) , l’autre concernant un soi-disant vol et des violences à l’encontre d’un huissier de justice lors d’un piquet de grève devant un centre d’appel. Face à un procureur qui annonçait publiquement vouloir en finir avec une CGT lutte de classe au Havre, la forte mobilisation interprofessionnelle de mars 2014 permettra d’obtenir la relaxe sur le second dossier mais une condamnation à des amendes dans le premier.

Malheureusement, l’acharnement judiciaire ne s’arrête pas pour autant. La mobilisation contre la loi El Khomri, qui s’est traduite localement par des actions de blocage de l’économie, sera l’occasion de nouvelles procédures et de nouvelles condamnations contre les militants de la CGT. Ainsi notre camarade Laurent Pontieux sera condamnée à 6 mois avec sursis pour des dégradations sur la porte des locaux du parti socialiste à l’issue de la manifestation du 12 mai 2016.

Puis c’est le tour de deux autres de nos camarades dockers du havre qui seront interpellés à leur domicile à 6h du matin comme des voyous, le jour même de la présence de Philippe Martinez au havre le 31 aout 2016, ce qui résonne comme une véritable provocation. L’un d’entre eux sera condamné à 6 mois de prison avec sursis à la suite des provocations policières lors de la manifestation nationale du 14 juin 2016 à Paris.

Plus récemment, le 18 juillet 20017, notre camarade Mikael, agents de la mairie du Havre, la ville du 1er Ministre Edouard PHILIPPE été condamné à neuf mois de prison avec sursis et à verser à la municipalité près de 15 500€ de dommages et intérêts pour avoir alimenté un feu sur la voie public dans le cadre d’une grève massive des agents municipaux sur les salaires, feu qui n’a fait aucun blessé, seul un lampadaire public ayant été endommagé. Neuf mois avec sursis, ce n’est pas suffisant pour le parquet qui demandait du ferme et fait appel.

Ne croyons pas qu’il s’agisse d’actes isolés d’un procureur de la république particulièrement anti-lutte de classe. Au contraire, comme le démontre l’explosion au niveau nationale des poursuites contre les militants, qu’ils soient syndicaux, associatifs ou politiques, ou encore l’utilisation de l’Etat d’Urgence pour empêcher des militants de défiler dans la rue, il s’agit bien d’une politique décidée en haut lieu visant à amoindrir la résistance aux politiques anti-ouvrières et anti-libérales des gouvernements de droite comme de gauche, visant à supprimer toute forme de lutte de blocage de l’économie.

C’est donc bien à une justice de classe, au service des riches et des possédants à laquelle nous sommes confrontés, une justice qui condamne à de lourdes peines les militants mais qui protège les employeurs même en cas d’homicide. Nous voulons parler ici de la situation de l’amiante où aucune poursuite judiciaire n’a à ce jour été engagé contre les industriels de l’amiante alors que les chiffres avancés par la Sénat font état de 100 000 morts d’ici 2050. Cela résonne comme l’obtention d’un permis de tuer sans risque pour le patronat.

Quant aux accidents du travail qui continuent à faire des ravages notamment pour les jeunes précaires, les peines, quand les parquets engagent des poursuites, ne dépassent que très rarement les 5000 à 10 000 € d’amende même pour un bras arraché….

Si la justice est violente contre les militants syndicaux, elle l’a été aussi contre votre collègue Laura Pfeiffer et le lanceur d’alerte de TEFAL, injustement condamné pour avoir transmis à vos organisations syndicales les preuves des pressions du patronat relayé par son directeur en local.

Malheureusement, une partie du patronat cherche à utiliser les mêmes recettes pour tenter de venir à bout des contrôleurs et inspecteurs du travail qui font le boulot. Dans le département de la Seine Maritime, nous avons vu l’entreprise NEMERA, grosse entreprise de plasturgie, initiée une pétition signée par une vingtaine de chef d’entreprise afin de faire la peau à un de vos collègues au seul motif qu’il était exigeant en matière de captation à la source d’émanations cancérogènes. Si l’intervention publique des différentes structures de la CGT, fédération chimie, syndicat de l’inspection du travail et UD 76 a permis la confirmation par la DGT de l’obligation de captation à la source, force est de constater que votre hiérarchie n’a pas pris les mesures en temps et en heure pour stopper cette cabale patronale qui tente de faire croire que c’est l’action de l’inspection du travail qui supprime aujourd’hui des emplois.

Pour en finir sur la question de la violence, puisqu’il est reproché à votre camarade Auriane de la violence verbale contre la Ministre chargé de la destruction du code du travail, quelques mots sur la violence interne à la Dirrecte de Seine Maritime.

Nous avons en effet été alerté de plusieurs agressions de la part d’un responsable de vos services contres plusieurs agents de la DIRECCTE ayant dans au moins deux cas donné lieu des accidents de services reconnus par l’administration. Il s’avère qu’il s’agit d’adhérents de la CGT. Dans l’un des cas, il s’agit d’une agression à caractère sexuel pour laquelle l’inaction de l’administration à la connaissance des faits a donné lieu à la réitération d’agressions mais aussi à la prolifération de ce qu’on peut considérer être des menaces de morts. Il s’agit là de faits extrêmement graves portés à la connaissance de votre DRH national M. BLONDEL, lequel n’a pas choisi d’entamer une procédure disciplinaire à l’encontre de l’auteur mais de traiter le dossier en accordant une promotion en tant que directeur du travail à M. Eudes de Morel, désormais exfiltré dans les services préfectoraux. Cela parait complètement fou mais c’est une triste réalité que nous pouvons prouver.

Violence des rapports sociaux avec du management agressif, violence des réorganisations forcées avec des effectifs en baisse, violence de laisser des agents travailler dans des locaux comprenant de l’amiante dégradée, ce n’est là que le début d’une longue liste des actes de violence commis par votre employeur comme par les autres employeurs publics ou privé…

Répétons le – la violence est dans l’autre camp – dans le camps des actionnaires, des patrons et des ministres

Faire état publiquement, dans la presse, dans les meetings ou par tract de la situation de vos services, sur les effectifs, sur les conditions de travail est une nécessité. Au-delà nous avons besoin de garder des inspecteurs et des contrôleurs du travail qui puissent témoigner de leurs constats globaux sur la non-application du code du travail par les employeurs et les risques que font peser les organisations du travail sur la santé des travailleurs, raison pour laquelle il faut abroger le code de déontologie de l’inspection du travail.

Bien évidemment, l’attaque contre votre camarade Auriane est une attaque contre toute l’inspection du travail.

C’est aussi une attaque qui s’inscrit dans une dynamique plus large, la tentative de museler, de casser ou de réorienter l’action de l’ensemble des acteurs  intervenants dans les entreprises au côté des travailleurs. On veut parler des réformes successives pour briser la médecine du travail de prévention et la ré-orientation des missions vers la sélection de la main d’œuvre, parler des nouvelles réductions de moyens pour l’INRS et les services de prévention des CARSAT qui vient d’être annoncé, mais aussi des attaques successives contre la représentation du personnel avec la suppression des CHSCT et la limitation des mandats, ce qui signifie en pratique que les militants syndicaux vont tous être désormais titulaire d’un CDD de 12 ans avant licenciement pour ceux qui ne signeront pas les accords voulu par le patronat.

Aujourd’hui, nous disons haut et fort, arrêt de la procédure contre Auriane, annulation des sanctions contre les militants syndicaux, abrogation du code de déontologie mais aussi :

  • Abrogation des lois Rebsamen, El Khomri et des ordonnances Macron
  • Doublement des effectifs des services de l’inspection du travail et des renseignements
  • Renforcement des moyens des parquets pour lutter contre la délinquance patronale

La lutte est difficile mais nous devons continuer à la mener.

Rouen, le 13 décembre 2017